Au moment où la bio-diversité est, chaque jour, plus menacée, l'Association Kokopelli s'emploie depuis 15 ans à préserver, en France et ailleurs (en Inde, par exemple), des variétés anciennes de végétaux, principalement des légumes.
L’association s’appuie sur un réseau d’adhérents qui pratiquent de nombreux échanges de semences dans divers buts dont celui de bénéficier de variétés que l’on ne trouvera généralement pas aux étals, des variétés qui offrent notamment des goûts (et des couleurs) particulièrement intéressants : des qualités organoleptiques rares et originales dans le paysage alimentaire courant.
Kokopelli agit également dans le cadre d’échanges internationaux dans le Tiers-Monde : production de semences données aux paysans et paysannes, organisation de formations à la production de semences, création de banques de semences, soutien à la création de réseaux paysans semenciers.
D’un point de vue biologique l’activité de l’association a pour conséquence que des espèces et variétés qui dormiraient dans quelques banques de semences, au risque de s’y perdre ou d’y être oubliées, sont mises en culture chaque année, à petite échelle, par quelques milliers de jardiniers pour ce qui concerne la France.
Dans une vision utilitariste, l’association assure donc la préservation active et efficace de gènes qui pourraient nous servir dans l’avenir.
Cela ne porte aucun préjudice au commerce ni au "libre jeu du marché" : dans notre économie "libérale" le commerce de ces semences est une des formes "du marché" dont l’existence peut être défendue au nom de la liberté d’entreprendre.
Quels sont les volumes concernés ? Environ 4000 jardiniers produisent leurs graines ou les achètent à l’association.
A quel montant d’achat peut-on estimer le panier de graines d’un jardinier ? 20 euros par an ?
Cela donnerait un chiffre d’affaire de 80.000 €, que ne percevraient pas les semenciers "officiels" : on peut probablement estimer ce montant comme négligeable par rapport à l’ensemble du marché, le bénéfice annuel d’un seul semencier "officiel" pouvant être de 800.000 euros, comme le laisse entendre l’association dans son dernier communiqué : Kokopelli : biodiversité, la fin des illusions.
Même si ce montant était 100 fois plus important, le dommage serait négligeable à différents points de vue dont le plus sensible est celui de la conservation des espèces et de la biodiversité.
On la sait menacée de toutes parts et nous devrions être tous conscients que son amoindrissement régulier est une perte irrémédiable qui pourrait entraîner la nôtre.
Pensons ici à ces affections plus ou moins indéterminées qui déciment les colonies d’abeilles à peu près partout dans le monde. La disparition des abeilles entraînerait celle de la plupart des espèces qui se reproduisent par pollinisation, soit au moins 30% de nos ressources alimentaires, de nos fleurs...
Il y a donc une urgence extrême à préserver la biodiversité dont nous bénéficions encore, urgence à empêcher la disparition de la moindre des espèces, la moindre variété : nous sommes dans le cours de la sixième grande extinction des espèces que la Terre ait connu, cette extinction est de notre fait, nous en sommes responsables et rien n’indique qu’elle ne s’aggrave pas, bien au contraire.
Sur l’aspect de la nature de notre civilisation, de sa qualité, elle intègre le fait de s’alimenter et a porté à un très haut degré de finesse ce que nous appelons "gastronomie" ou "cuisine" : il ne s’est jamais vendu plus de livre de cuisine que dans ces dernières années. Preuve s’il en fallait que cet aspect de notre civilisation intéresse beaucoup de nos contemporains.
Mais en amont de la cuisine, de la gastronomie, il y a les "produits", les légumes, fleurs, fruits...
Et
telle tomate bleue, rouge ou blanche, née d’une des graines sortie d’un
sachet de chez Kokopelli ne ressemblera en rien, dans l’assiette, à ce
que l’on cueille sur un très officiel pied "d’hybride F1".
Il convient de souligner ce fait dans un pays qui organise chaque année une "journée du goût" et dans lequel on voudrait exercer une "politique de civilisation" : les sommets de la gastronomie (car de grands "chefs" utilisent de ces légumes "interdits") devraient-ils en être exclus ?
Exclus parce-que ces fameuses semences de Kokopelli ne sont pas inscrites au registre officiel des semences (l’inscription est fort coûteuse), un registre dont il n’existe pas d’équivalent dans tous les pays du monde, et qui empêche en France la commercialisation, sous quelque forme que ce soit, d’espèces et de variétés non inscrites.
Ce registre est une sorte de "spécialité civilisationnelle" française qui a permis que l’association Kokopelli vienne d’être condamnée à un total de 35.000 euros d’amendes, frais et indemnités.
Kokopelli compte à ce jour environ 4.300 adhérents, les adhésions sont possibles sous 3 titres : soutien à 20 euros, actif à 60 euros et bienfaiteur à 150 euros.
Une multiplication rapide par 10 ou plus de ce nombre d’adhérents serait un signal fort donné par celles et ceux qui pensent que la biodiversité n’a pas de prix à nos législateurs afin qu’ils modifient les règles en vigueur, qui ont permis ces condamnations.
A défaut d’autres actions (non violentes bien entendu), c’est le moins que chacun puisse faire pour défendre des défenseurs de la biodiversité, du goût et de la liberté.
(texte très très largement volé à jcm, que je remercie ici)
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