Ça, c'est un bel estomac !
40.000 tonnes d'huile de tournesol, d'origine ukrainienne, coupées
par 280 tonnes d'huile de moteur (non-végétale, minérale), ont été importés en Europe de l'Ouest fin février dernier.
Cette huile frelatée se retrouve dans toutes sortes de
produits alimentaires (de 150 à 200), distribués dans plusieurs pays européens.
“Officiellement, rapporte le Canard enchaîné du 14 mai dernier, tout commence le 21 avril dernier, quand le groupe Saipol,
numéro un français de la transformation des oléagineux et accessoirement
propriétaire de Lesieur, prévient la Répression des Fraudes que son usine de
Sète, où est raffinée de l’huile de tournesol brute, il y a un sérieux pépin.
Une grosse rasade d’huile achetée en Ukraine est farcie à l’”huile
de moteur“, huile minérale dérivée d’hydrocarbure.
“Et pas qu’un
peu : d’après nos informations, sur 2800 tonnes d’huile apparemment
irréprochable, livrées en France, 19 tonnes auraient mieux fait d’aller
graisser des rouages et des pistons que des gosiers. Deux jours plus tard, la
France informe officiellement ses voisins européens : cette cargaison fait
partie d’un énorme lot de 40.000 tonnes, qui a atterri non seulement en France,
mais aussi aux Pays-Bas, en Italie et en Espagne. Et c’est tout le lot qui a
été trafiqué !
“De quoi, pour les escrocs, se faire du beurre : sachant que la
tonne d’huile de tournesol brute est vendue 1800 euros et que d’après les
confidences d’un fonctionnaire de la Commission européenne, ce sont en tout pas
moins de 280 tonnes d’huile de moteur qui ont été introduites en douce dans les
containers, les margoulins d’Ukraine ont empoché un bénéfice de 504000 dollars
(moins ce qu’ils ont déboursé pour l’huile bidon, certes, mais celle ci coûte
des clopinettes).
“A partir du 26 avril, la Commission européenne et la répression des fraudes
rendent publique l’alerte. Officiellement, l’huile de tournesol frelatée mise
en bouteilles et les plats préparés à partir de cette mixture ont tous été
retirés des rayons et “n’ont pas atteint le consommateur“. Fort bien,
mais, au fait combien de lots ont été retirés en tout ? Questionnée par “Le
Canard”, la DGGCRF, autrement dit, la Répression des fraudes, explique que
“compte tenu du nombre d’entreprises concernées, il est impossible d’en
connaître le nombre exact“. Chez Carrefour Promodès, enseigne qui possède
la moité des grandes surfaces alimentaires en France, on admet du bout des
lèvres avoir retiré pas moins de… 200 produits concernés !
Les bonnes recettes de Mamie Europa : ça eût Kraigne, mais ça craint pas
“Bref, tout baigne. Sauf qu’il reste un léger problème : Saipol, la maison
mère de Lesieur (laquelle marque a fait répondre au Canard par
son agence de com’ qu’elle n’était “en rien concernée“), a reçu sa
cargaison d’huile frelatée fin février. Et n’y a vu que du feu. Jusqu’à ce
qu’un mois plus tard un industriel du nord de l’Europe, destinataire du même
lot, l’informe après analyse que quelque chose clochait dans l’huile de
tournesol ukrainienne . Et ce n’est qu’un mois plus tard que Lesieur a enfin
sonné l’alerte auprès de la Répression de fraudes. La question qui se pose est
cruciale : combien de produits assaisonnés à l’huile frelatée ont été
conditionnés et commercialisés entre-temps ? Saipol reconnait avoir raffiné
l’huile en question pour la vendre ensuite à “une trentaine de
clients de l’industrie agroalimentaire“, dont il refuse de citer les noms. Mystère
et salade verte. […]
“Mais il y a plus sérieux : contrairement à ce qu’ont d’abord assuré
la Commission européenne et les pouvoirs publiques français, tous les produits
additionnés d’huile contaminés n’ont pas été retirés des rayons. En effet, le 2
mai, la Commission européenne s’est fendue en catimini d’une recommandation
autorisant la vente de tous les aliments contenant moins de 10% d’huile de
tournesol frelatée. […]
“Comme l’admet la DGCCRF dans une note adressée au Canard, le 7 mai,
“en l’absence de toxicité aiguë”, tant pis pour les mayonnaises et autres
petits plats déjà vendus. “Aucun rappel” n’a été effectué .[…]
Les sociétés (et toutes leurs marques et sous-marques) concernées selon Le
Canard enchaîné, sont "Saupiquet, Unilever (propriétaire de
Knorr, Magnum, Fruit d'Or, Miko, Planta Fin, Amora…) mais également Carrefour
Promodès et Auchan. Ainsi, on peut trouver cette huile de moteur dans des
batonnets de Surimi, du cèleri rémoulade, de la soupe de poisson en conserve,
du poisson pané, des paupiettes de veau, du thon et des sardines à l'huile,
mais aussi dans la pâte à tartiner chocolatée, le blé pour petit déj', les
gauffrettes à la confiture, les barres céréalières et sucrées pour les enfants,
les cookies et bien sur la mayonnaise, le tarama, la sauce béarnaise et enfin
de la sauce vinaigrette." 150 à 200 références sont concernées.
Impossible de savoir avec précision lesquelles !!
Encouragez l'ANIA à être moins timide !
La semaine dernière, le Canard publie des notes internes de l¹ANIA (Association Nationale des Industries Alimentaires), qui montrent l'envers du décor, et la terreur des industriels qui prient pour que l¹info ne soit pas reprise et que le temps efface rapidement cette histoire.
Il a été décidé en réunion de crise à l'ANIA de ne pas répondre formellement au Canard enchainé. Un projet de communiqué de presse, préparé il y a deux semaines, a été réactualisé. Il ne sera pas diffusé en “proactif“ : “Nous attendons la prochaine parution du Canard Enchaîné et les éventuelles reprises par la presse pour réagir".
Je ne sais pas à quel point ces produits à l'huile frelatée sont
dangereux, mais je sais que les consommateurs ont droit à la
transparence, à une information honnête et au respect de la part des
filières de l'industrie alimentaire. Le fric ne justifie pas tout. Et surtout pas cela.
Ben il faut les aider à être “postactifs“, ces braves gens de l'ANIA. Diffusez largement cette info sur vos blogs, chez vos amis, boycottez les produits en question et achetez bio.
Merci à Fé et à Raffa.
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