Il y a finalement quelque chose de profondément moral dans cette immorale affaire Madoff : le bonhomme s'est moqué pendant 40 ans d'organismes (banques, fondations, entreprises) et de gens fortunés qui, tout à la recherche du profit maximum, ne se posaient aucune question sur la manière d'y parvenir et en perdaient toute intelligence et toute raison.
Madoff les rassurait en disant placer l'essentiel de ses fonds en bons du trésor américain (rémunérés, en moyenne, entre 3 et 7%) et leur garantissait plus de 10% de revenus. Ses interlocuteurs, aveuglés par leur cupidité, n'y ont vu que du feu.
L'argent et le profit rendent fou. Et bête, par-dessus le marché. Débranchons les fous : Mad off !
Il serait plus que temps de se demander si la seule réforme d'importance à faire ne serait pas, comme le recommandent après tout les Livres (la Bible, le Coran...), d'interdire l'usure et de limiter le profit. Pour le mécréant que je suis, ce n'est pas rien de dire ça et de me référer aux Ecritures.
Quelle forme cela pourrait-il prendre ? Dans le cas d'une entreprise, limiter le profit possible à 10% au-delà desquels il serait taxé à 100%. Que faire de ces 10% ? Les répartir en 4 parts égales : les salariés, les actionnaires, l'investissement, les fonds propres.
Bien sûr, pour que le profit ne soit pas déguisé ou camouflé, cela supposerait également que les salaires et accessoires soient règlementés et limités.
L'échelle des revenus court aujourd'hui de 1 à l'infini : difficile d'évaluer salaires, stock options, primes, avantages, indemnités et autres accessoires de certains chefs d'entreprise : combien gagnait en réalité Antoine Zacharias, PDG de Vinci de 1997 à 2005, qui, outre un salaire annuel de 3,595 millions d'Euros, avait accumulé pour environ 173 millions d'Euros de stock-options, plus 2 millions d'actions, plus 13 millions d'indemnités de départ ?
Le salaire annuel moyen des PDG du CAC 40 frôlait, en 2005, 2,3 millions d'Euros (soit près de 200 fois le salaire minimum), hors accessoires. Il a été largement réévalué depuis pour se rapprocher de celui des PDG des 100 plus grandes entreprises US qui atteignait la même année 17,9 millions de dollars. Le recordman du genre étant l'américain Lee Raymond, ancien PDG d'Exxon Mobil, qui s'est vu accorder en 2005 un salaire de 69,4 millions de dollars et une prime de retraite de 98,4 millions de dollar.
Dans ces conditions, il importe de réduire drastiquement une échelle des salaires qui s'est dramatiquement allongée au cours des 20 dernières années. On pourrait, par exemple, la ramener :
- de 1 à 4 pour les entreprises de 2 à 10 salariés,
- de 1 à 5 pour les entreprises de 11 à 50 salariés,
- de 1 à 10 pour les entreprises de 51 à 150 salariés,
- de 1 à 50 pour les entreprises de 151 à 1.000 salariés,
- de 1 à 100 au-delà de 1.001 salariés.
Concrètement, cela signifie que pour un salaire minimum net d'environ 1.000 € mensuel, le gain maximum d'un cadre de direction ou un chef d'entreprise serait de 100.000 € mensuels. Ramené au salaire médian, l'échelle des traitements serait de 1 à 66. C'est dur, mais pas tant que ça.
La difficulté principale sera d'obtenir un consensus international sur ces principes (faute de quoi, il suffira pour certains de se faire payer à l'étranger ou de choisir l'exil) et, parallèlement, de mettre fin aux zones de non-droit que sont les paradis fiscaux. Autant dire qu'on n'y est pas encore.
Pourtant, hors de là, pas de réforme ou de refondation du capitalisme qui vaille.
Dommage, ça partait bien et tu t'es perdu en route...
Il me semble important de ne pas confondre rémunération du capital (des actionnaires)et rémunération des dirigeants.
C'est extrêmement différent et, si la seconde à une importance morale indiscutable, le coeur du problème me semble se situer infiniment plus dans la première.
Sur ce sujet, je le répète, les SCOPs ont monté et expérimenté un modèle qui permet de plafonner la rémunération du capital par celle du travail. C'est très bien vu, et ça évite le plafonnement à 10% qui tuerait l'innovation. (l'ensemble des capitaux se dirigerait alors faire les gros business sereins, qui crachent leurs 10% régulièrement).
Quant aux Ecritures, elles ne faisaient aucune différence, au départ, entre "usure" et "intérêt". Cette subtile distinction, basée sur... rien du tout, a été introduite par la suite dans le monde chrétien., pour des raisons qu'on comprendra...
Le Coran ne fait pas (encore) de distinction.
En bref, si on se réfère à des valeurs morales, il est clair que toute rémunération du capital est purement et simplement du vol.
Rédigé par : Casabaldi | 16 décembre 2008 à 13:17
Perdu en route... Peut-être ;) Mais pas si sûr.
La question de la rémunération du capital est, bien sûr, fondamentale, mais de quoi parle-t-on ?
Après la seconde guerre mondiale, au capitalisme traditionnel (le patron et sa famille, directement impliqué dans l'entreprise dont il détient les actions) s'est substitué majoritairement, dans les grandes entreprises nationales et multi-nationales, un capitalisme déconnecté de l'entreprise, détenu ou contrôlé, pour l’essentiel, par des organismes financiers (banques, assurances, organismes de gestion privée ou collective -caisses de retraites, etc) qui, le plus souvent, gèrent d'ailleurs principalement l'argent de tout un chacun (épargne, futures retraites, etc).
Au bout de ce schéma, les capitalistes, ce sont bien sûr quelques milliardaires individuels et voyants, mais c’est pour beaucoup et, sans doute majoritairement, via notre épargne directe ou indirecte, toi ou moi.
A ce titre, sommes-nous donc personnellement des voleurs ou les éléments d’un écheveau complexe dont la logique conduit parfois à mettre un homme au chômage pour qu’on puisse, in fine, lui verser une retraite ?
La mutation du capitalisme dans la seconde partie du XXe siècle a eu pour conséquence l’émergence d’une classe d’intermédiaires, détenteurs de ce qu'on pourrait appeler un “quasi-capital“, représentée, d’une part, par les gestionnaires financiers (traders et autres golden boys) et, d’autre part, par la classe des managers des grandes entreprises.
Ceux-là gèrent leurs boîtes pour le compte et dans l'intérêt du capital qui leur fixe des objectifs, mais, de plus en plus, depuis 30 ans, ils les gèrent également dans leur propre intérêt.
Forts pour les uns d’une technicité financière complexe et, pour les autres, d'une connaissance de l'entreprise, de ses hommes, de ses métiers et de ses marchés que n'ont pas leurs financiers, ils exigent, en paiement du service rendu (augmenter le profit à n'importe quel coût, notamment social), salaires délirants, stock-options, primes de résultat, parachutes dorés, etc. Ce sont ceux-là qui sont directement responsables de la distorsion des revenus.
Au-delà des grandes entreprises, il y a eu émergence de ce qu'on pourrait appeler un “nano-capital“, représenté par nombre de patrons de petites entreprises.
Ceux-là ont développé leur entreprise avec de l'huile de coude pour tout capital. Mais, de plus en plus souvent, et de manière accélérée depuis 10 ans, quand ils réussissent, ils calquent leur mode de vie sur celui des managers de grandes entreprises, dont les médias leur martèlent les aventures et les réussites.
Ceux-là ne réalisent pas généralement des profits spectaculaires, ne se servent pas forcément des dividendes, mais des salaires et des avantages divers. Techniquement, ils ne rémunèrent pas du capital mais, sous forme de salaires disproportionnés ou d’avantages (frais de représentation, véhicules, etc), ils font financer leur train de vie personnel par leur entreprise. Ce qui revient au même.
Dans tous les cas, et quel que soit le mode technique de la rémunération ou le statut du bénéficiaire, cela aboutit à la minoration de la rémunération du travail non connecté au capital et à l’augmentation de la rémunération du capital et de ses agents.
Dans tous les cas, cela aboutit à un allongement de l’échelle des salaires.
C’est donc l’ensemble des aspects de la rémunération du capital ou de ses séquelles qu’il convient de traiter et non seulement tel ou tel aspect.
A cet égard, comme tu le soulignes, le modèle des SCOP est sans doute porteur d'avenir :)
Rédigé par : José | 16 décembre 2008 à 22:03
Hé vivo el socialismo y la libertad ( musique en fond).
Rédigé par : luluberlu | 17 décembre 2008 à 12:28
Question : pourquoi faire une différence selon le nombre de salarié de l'entreprise ?
Rédigé par : vlg | 18 décembre 2008 à 15:15
@vlg : Parce que l'importance des enjeux et des responsabilités, la nature et la charge du travail, la diversité des compétences requises n'est pas la même, selon qu'on dirige une équipe de 3 personnes et une entreprise de 100, 1.000 ou 10.000 personnes. En bref, ce n'est pas du tout le même travail.
D'autre part, on peut estimer juste que la rémunération des chefs d'entreprise soit relative à la taille de l'entreprise (dont le nombre des salariés est une bonne mesure) et à ses possibilités financières.
Une entreprise de 3 personnes ne peut pas générer les revenus nécessaires pour offrir, mettons, deux salaires net mensuels de 1.000 €, plus un salaire de 100.000 €, ce qui signifie, une fois chargé, 204.000 € par mois, avant frais généraux.
Au total et en pourcentage de l'activité, ça n'a pas de sens.
En revanche, plus l'entreprise grandit, plus elle doit faire appel à une diversité de compétences ou de responsabilités qui supposent des différenciations des rémunérations qui peuvent être importantes, mais qui, en pourcentage, impactent d'autant moins le coût total de l'entreprise que celle-ci est plus grande.
Exemple : dans le cas absurde de notre boîte de 3 personnes, 1 des 3 salaires représente 98% de la charge salariale.
Prenons maintenant le cas d'une boîte de 1.001 personnes et collons lui une masse salariale de 1 à 100, en partant de 1.000 €.
Dans cet exemple fictif, prenons 9 échelons de salaires :
- 150 personnes payées 1,000 €
- 450 personnes payées 1,500 €
- 150 personnes payées 2,000 €
- 150 personnes payées 3,000 €
- 65 personnes payées 5,000 €
- 30 personnes payées 10,000 €
- 10 personnes payées 20,000 €
- 5 personnes payées 50,000 €
- 1 personne payée 100,000 €
Dans cet exemple, la rémunération moyenne est assez haute (2,750 €e poste de la personne la mieux payée ne représente plus que 4% de la masse salariale.
Prend le même exemple sur une entreprise 10.000 personnes, on tombe à 0,4%, etc.
Maintenant, si le sens de la question est pourquoi ne paierait-on pas le PDG de Renault 3.000 € par mois, comme un patron de micro-entreprise, là je suis désarmé... :))
Rédigé par : José Ferré | 18 décembre 2008 à 17:17
Clair éclairage!, les armes déposées, tu croies pas que cela est la seule issue à l'organisation de plusieurs milliards de goulues sapiens?. histoire d'une redistribution écolo-etho-economique, et durable, (plus que les deux générations avenirs)....
Rédigé par : luluberlu | 19 décembre 2008 à 16:42
parceque personne ne voudrait de ce boulot pour 3000 par mois, peut etre
Rédigé par : sophie | 20 décembre 2008 à 15:58
@ sophie : Pour la moitié tu en trouvera bientôt...
Rédigé par : luluberlu | 21 décembre 2008 à 12:24
C'est en effet difficile d'imaginer de tels préceptes faisant l'objet d'un consensus mondial.
Peut-être trois pistes à promouvoir par tous moyens adéquats:
- développement massif de la pédagogie économique (que nos concitoyens ne confondent plus l'économie et la loi de la gravitation universelle)
- regarder en effet de plus près comment, par exemple, les musulmans conçoivent la finance. Ce n'est pas une blague:il y a un développement très spectaculaire de fonds financiers fonctionnant selon ces préceptes
- puisqu'il va y avoir des élections européennes en 2009, être très attentifs aux propositions en matière de gouvernance économique à ce niveau (loin des gesticulations de Sarko) ce qui serait déjà un début.
Rédigé par : Huron | 24 décembre 2008 à 15:42