Demain, il y aura un an que Nicolas Sarkozy a été élu Président de la République. Depuis plus d'une semaine, les médias dressent des bilans, généralement peu flatteurs, appuyés par des sondages calamiteux.
J'ai plutôt choisi de republier ci-dessous, sans y toucher un mot, le post écrit le 5 mai 2007, à la veille du second tour. Je tentais d'y expliquer mon choix entre les deux finalistes : il y aurait pas mal de choses à ajouter, tant l'année fut à la fois frénétique dans la forme et sans surprise sur le fond, mais peu à retrancher, tant il semble que Nicolas Sarkozy s'est appliqué à illustrer la formule de Lampedusa dans Le Guépard : “Il faut que tout change pour que rien ne change.“
On pourra également jeter un œil sur “4 mois d'ère Sarkozy“, 3 posts écrits ici en septembre dernier (la forme, sécurité intérieure et insécurité extérieure, économie).
Dans l’idéal, j’aurais préféré autre
chose : quelqu’une ou quelqu’un qui aurait posé des questions de fond
et en aurait déduit des réponses de surface, plutôt que l’inverse.
Au lieu de quoi, nous avons été gratifiés de ce spectacle déroutant
où nombre de questions fondamentales ont été escamotées, où les
candidats, cantonnés –par eux-mêmes, leurs partisans, les médias et
leurs auditoires- dans un rôle de “techniciens de surface“, ont posé en
nettoyeurs superficiels de la société et de l’Etat, évitant
soigneusement les écuries d’Augias, les coins, les recoins et le
dessous des meubles.
Mais, après tout, la hauteur de vue est un art difficile, impossible
peut-être, quand les temps sont bas de plafond. M’est avis cependant
que nous n’en ferons pas longtemps l’économie.
Restent donc deux candidats. Sans aucun doute, dans ce contexte, les
meilleurs de leur camp : il n’y a pas de meilleur conservateur que
Nicolas Sarkozy ; il n’y a pas de meilleure réformatrice que Ségolène
Royal.
Non que l’un ou l’autre soient exceptionnels ou irremplaçables, mais
personne n’est survenu pour les concurrencer sur le territoire qu’ils
avaient préempté, celui de la rénovation de leur propre famille : ni
Michèle Alliot-Marie, ni Dominique de Villepin, ni Laurent Fabius, ni
Dominique Strauss-Kahn… Ni François Bayrou, qui voulait former une
nouvelle famille sur les décombres des deux autres, en s’appuyant sur
ce qu’il avait sous la main, un espace étroit peuplé de faux-frères.
Restent donc deux candidats.
Nicolas Sarkozy, doux aux forts, dur aux faibles
De Nicolas Sarkozy, au-delà du personnage que je ne juge pas, je ne
partage ni les choix atlantistes en politique extérieure (qui le place
loin de la tradition gaulliste et loin sans doute d’une vision d’avenir
pour le monde), ni les choix ultra-libéraux en économie et en politique
sociale, ni les choix réactionnaires sur les sujets les plus divers
(environnement, inné-acquis, égoïsme de classe, etc).
Le libéralisme qu'il défend relève d’une “mode“ vieille de 30 ans,
dont chacun peut mesurer à quel point, si elle a permis la création de
richesses, c’est dans un esprit d’égoïsme et d’individualisme forcené.
Il s’agit de donner toujours plus aux riches en dépouillant les
pauvres, de tirer toujours plus de lignes de crédit, de prélever
toujours plus de ressources naturelles en en privant les générations
futures.
Le libéralisme qu’il défend fonctionne au prix de la dévalorisation
du travail, de la sur-valorisation du capital, de la sur-consommation
des ressources naturelles, de la destruction massive de
l’environnement, du lien social, de la solidarité, des services publics
et de l’accroissement des inégalités, en France comme ailleurs.
Le modèle sociétal défendu par Nicolas Sarkozy, repose sur l’absence
de contraintes en économie et l’usage de la contrainte d’Etat en
politique.
C’est cette double identité qui distingue les libéraux
“conservateurs“ d’aujourd’hui de la grande tradition libérale
“progressiste“ du XIXe siècle.
Quoiqu’il en dise et quelles que soient les flatteries qu’il adresse
aux travailleurs-travailleuses, le modèle proposé par Nicolas Sarkozy
est doux pour les forts et dur pour les faibles ; il prône la liberté
pour les premiers et son aliénation pour les seconds.
Il le fait sans complexes. Avec une gourmandise de pouvoir, un
narcissisme et une brutalité d’expression qui augurent mal de son sens
du dialogue social et de la démocratie. Nicolas Sarkozy fait peur.
D’autant que ses opinions, ses intuitions, ses analyses, sont souvent
infondées.
Que sera la politique étrangère de celui qui se flatte d’être appelé
“Sarko l’américain“ ? Curieux sobriquet pour qui veut établir un
“Ministère de l’immigration et de l’identité nationale“.
Le projet de Nicolas Sarkozy, au total plus ancré dans le XIXe
siècle dans le XXIe. dessine un monde ancien plus qu'il n’esquisse une
vision d'avenir. A moins que l’avenir ne soit très sombre. Mais dans ce
cas, il se passera de mon approbation. Donc, décidément, je ne voterai
pas pour lui.
En face, Ségolène Royal, propose des choix très différents...
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