Le post qui suit est un peu long et un peu technique. Veuillez m'en excuser. Mais il décrit succintement quelques-unes des structures de proximité qui gèrent votre vie quotidienne. A ce titre, et en ce jour d'élections municipales et cantonales, il mérite une lecture attentive.
Regardez les huit cartes ci-dessous. Elles représentent, dans un Département métropolitain témoin (ce pourrait aussi bien être un autre, tous sont à la même enseigne) et, plus précisément, dans un tiers de ce département, quelques-unes des strates administratives, politiques ou contractuelles existantes.
Cette construction, ce maillage d'une rare complexité, s'est constitué par empilement de nouvelles strates, au fil des siècles et des années, dans un rythme emballé depuis une trentaine d'années, sans qu'on ne songe jamais à réformer, supprimer ou simplifier les dispositifs pré-existants.
Partons de deux structures territoriales anciennes : la Commune et le Département. La carte du Département figure en grisé sur chacune des huit cartes, celle de la Commune est de couleur rose.
Pour mémoire, il existe en Allemagne 13.000 communes, environ 8.000 en Italie ou en Espagne et 36.785 en France.
Toute réforme sérieuse devrait partir de là. La commune, structure de proximité, devrait être une unité territoriale d'un minimum de 5.000 à 10.000 habitants et leur nombre devrait être ramené de 36.785 à quelque 10.000.
A cette taille, chacune pourrait mobiliser et organiser les ressources humaines et financières nécessaires à l'accueil et à l'entretien de services de base (administration, transports, enseignement, médecine, commerces...), élaborer, arbitrer et conduire de vraies politiques territoriales. Ce n'est évidemment pas le cas dans des communes dont la population moyenne est aujourd'hui de 1.700 habitants.
A cette taille, elles pourraient reprendre une partie des attributions et des obligations du Département, dont le rapport Attali estime, non sans raisons, qu'il faudrait carrément le supprimer (ce qu'a récusé le Président de la République), pour privilégier communes et régions. Mais avant même d'en arriver là, il conviendrait de faire un sort à d'autres structures intermédiaires.
Subdivision du département, les arrondissements départementaux (créés par la loi du 28 pluviôse an VIII -17 février 1800) sont eux-mêmes subdivisés en cantons et en communes.
A la différence des régions, des départements et des communes, les arrondissements départementaux ne possèdent pas le statut de personne morale de droit public ; ils ne sont pas gérés par des personnes élues, mais désignées par la présidence de la République : l'administration d'un arrondissement est confiée à un sous-préfet qui assiste le préfet du département.
Un temps (sous la IIIe République), l'arrondissement a correspondu avec une circonscription législative, mais ce n'est plus le cas (il y a aujourd'hui 342 arrondissements et 577 députés). Dans l'exemple donné ici, la commune regroupe environ 3.800 habitants et l'arrondissement 40.664.
Les cantons (créés en 1790, en même temps que les départements) forment une circonscription judiciaire en tant que siège du tribunal de première instance.
Par ailleurs, ils fournissent principalement un maillage électoral ; aux élections cantonales, chaque canton élit la personne amenée à le représenter au conseil général du département (sauf à Paris).
En zone rurale, le chef-lieu de canton héberge fréquemment les principaux services administratifs (brigade de gendarmerie, etc.) communs à plusieurs communes.
Les communautés de communes, comme leur nom l'indique, regroupent des communes qui peuvent mettre en commun et mutualiser des projets d'équipements collectifs dépassant l'intérêt ou les moyens financiers de chacune. Elles devraient à terme constituer l'unité de base d'une future réorganisation territoriale.
Sur le territoire donné en exemple donné ici, la population des 9 communautés de communes reste peu importante : elle varie de 985 à 7650 habitants (en moyenne : 4518 ; une taille efficiente serait plutôt de l'ordre de 10 à 15.000 habitants).
Les Pays (petite région, Pays peut désigner un territoire de projet caractérisé par une cohésion géographique, économique, culturelle ou sociale ; le découpage et l'échelle des territoires de projet sont proches et parfois inspirés des pays traditionnels ou régions naturelles de France) ont été créés par la Loi Voynet de 1999 sur l'aménagement du territoire, qui réactualise la notion de pays traditionnel avec l'identification de pays comme territoire de projet.
Gérés par des associations Loi de 1901 dont les membres sont les communes et les représentants leurs élus, les pays ont pour objet l'accompagnement du développement économique, la structuration des activités touristiques, la labellisation des produits agricoles, la valorisation des ressources forestières, l'amélioration de l'offre de logement, la promotion de politiques culturelles de qualité, le développement des nouvelles technologies de l'information et de communication.
Les Syndicats Mixtes de Pays, créés dans les années 90, visent à une meilleure organisation du territoire. A ce titre, ils ont vocation à élaborer un projet de territoire prospectif, ayant une approche transversale et interdisciplinaire (plus de détails ici).
Par exemple : définition d'une politique globale de l'habitat, embellissement et animation des centres bourgs, développement de l'activité touristique, amélioration de l'environnement et du cadre de travail, etc.
Dans l'exemple donné ici, le Pays regroupe 171 communes, 15 cantons et quelques 82.000 habitants. Chaque Syndicat de Pays concerne entre 15.000 et 20.000 habitants.
En plus de ces multiples structures, il faut ajouter celle des Parcs Naturels Régionaux, qui réunissent, dans notre exemple 9 cantons et 79 communes, à cheval sur deux départements et deux régions.
Il est géré par un syndicat mixte de gestion, composé d'élus des communes adhérentes, des 2 conseils généraux et des 2 conseils régionaux.
Sa vocation, qui recoupe celle des Pays et celle des syndicats mixtes de pays est de mettre en valeur le massif forestier, de mettre en place une politique de la gestion de l'eau et des rivières, d'encourager l'action et l'animation culturelle, de favoriser un tourisme de qualité, de valoriser le patrimoine pour créer de nouvelles ressources et de nouveaux emplois.
La huitième et dernière carte résume l'aberration de l'ensemble du système : par la superposition des limites des découpages des sept premières cartes, elle trace les frontières invisibles que la République et les générations ont tissées, les unes après les autres, comme une toile d'araignée qui finit par paralyser ou, au mieux, ralentir et entraver toute action d'intérêt public.
A superposer ou à mettre bout à bout toutes ces structures -et l'on est loin d'être ici exhaustif-, parfois complémentaires, souvent concurrentes, on voit aisément que leur nombre, leurs vocations ou leurs compétences se recoupent, se recouvrent et, finalement, souvent, tendent à s'annuler, du fait de l'incohérence de leurs périmètres géographiques, de la dispersion des moyens et des ressources, sans compter les oppositions partisanes ou intra-partisanes et les compétitions de personnes.
Un tel système aboutit à :
• complexifier ce qui devrait rester simple,
• dévorer le temps (et donc l'argent) des élus et des fonctionnaires, saisis de réunionnite exécutive ou légale (conseils d'administration, d'orientation et autres assemblées générales),
croulant sous des projets innombrables, éventuellement concentrés, pour
certains -ce qui est humain- sur la survivance de leur pré-carré,
fût-ce au détriment de l'intérêt général,
• démultiplier la charge administrative, particulièrement sensible et ingérable dans les petites collectivités,
• dévorer les budgets de fonctionnement (chacune des structures a sa propre “administration“, mobilise des fonctionnaires salariés
ou des élus dédommagés, occupe des lieux, génère des frais de
fonctionnement : au total, même si les hommes sont honnêtes et assez
modestement ou raisonnablement rémunérés, la complexité du
système est dispendieuse et encourage au gâchis),
• diviser les budgets d'investissement,
• empêcher toute vision globale (chaque organe voit midi à sa fenêtre et, assez souvent, collabore peu, mal ou pas du tout avec les autres),
• augmenter l'opacité du système
(plusieurs de ces structures ont pour vocation le développement
touristique, ce qui me concerne puisque je développe un petit complexe
touristique, significatif pour le territoire : depuis 4 ans,
contrairement au fisc qui m'adore, aucune des structures concernées n'a
pris contact avec moi, soit pour s'informer, soit pour me conseiller,
soit pour me faire participer à un projet quelconque :),
• et, finalement, paralyser l'action.
Tout cela mériterait d'être revu, corrigé, dynamisé et simplifié, non ? :)
Les seules qualités de cet empilement d'organisations sont
- 1) qu'il repose quasi exclusivement sur des structures adémocratique puisque leurs dirigeants sont non élus (et donc ne représentent personne);
- 2) qu'il permet de distribuer largement la soupe.
Rédigé par : bertrand | 10 mars 2008 à 09:20
Ah, les "Pays" et "le développement des nouvelles technologies de l'information et de communication" !!!
Tentant il y a quelques années de développer une activité internet, le "Pays d'Aunis" m'a, en gros, appris qu'existaient quelques organismes, tels la Chambre de Commerce, au demeurant connus du créateur d'entreprises !!!
Essayant de reprendre, ultérieurement, une entreprise en liquidation, il n'a pas fait beaucoup mieux.
A part de "beaux discours" pleins d'espoir...
Mais cela entretient quelques emplois, et n'y aurait-il pas là quelque "copinage" ?
Ah oui, simplifier, réorganiser tout cela !
Rédigé par : jcm | 10 mars 2008 à 09:33
36.000 communes, 100 départements, 22 régions et ... 1.250.000 emplois.
Les Chambres ayant autorité pour réformer sont constituées de cumulards directs ou par procuration, devant faire le nécessaire pour entretenir le mandat local. Les collectivités territoriales abritent nombre de chevilles ouvrières des partis ou des écuries locales.
Malheureusement les conditions du changement ne sont pas réunies. Il y a pourtant tellement à faire, sans a priori politique, juste avec bon sens. Mais d'abord, faire sauter le verrou politique.
Rédigé par : Michel B. | 10 mars 2008 à 16:10
Il y a pas de recettes universelles ,les structures créées precedement l'ont eté au fur a mesure que le besoin se faisait sentir car celles en place n'etaient pas pertinentes.Revoir l'ensemble ,faire le tri,adapter la resolution des problemes a la bonne taille ,Ok mais surtout pas d'idées evidentes sans etudes de terrains ,tel que la taille des communautés de communes a 10000 h le pif c'est bien mais c'est nul ,allez voir en ardeche , en corse ,ou en ville la solution est un peu plus compliquée.Beaucoup de problemes pourraient etre depolitisés.Les quantités hommes politiques devraient etres diminués de moitié et une partie de leurs competences professionnalisés.(pas les maires dans les petites communes surtout car ils ne coutent pas cher et font du bon boulot,ils ont surtout besoin d'assistance pro,par contre les deputes ou les senateurs ,pour dire toujours oui, 700 ou 100 c'est pareils.)
Rédigé par : MOSCA | 11 mars 2008 à 19:30