Le propre d'un “philosophe“ est de s'interroger et d'interroger, plutôt que d'affirmer, de jeter l'anathème et d'insulter.
A cette aune, Robert Redeker est donc bien peu “philosophe“. Il s'était illustré voici deux ans par une tribune dans Le Figaro, très polémique contre l'islamisme, qui lui avait valu des menaces de mort et provoqué en France un débat sur la censure et la liberté de parole.
Robert Redeker a publié samedi, dans Le Monde, une nouvelle tribune destinée à faire polémique, à l'occasion des doutes émis par Marion Cotillard sur la responsabilité des attentats du 11 septembre : celle-ci, se fondant sur des étrangetés révélées par des enquêtes “indépendantes“, reprend des thèses selon lesquelles la responsabilité de ces événements serait, à tout le moins, partagée par les autorités américaines, qui auraient laissé faire, provoqué ou participé à l'opération, bref, que celle-ci serait le résultat d'un complot, destiné à mobiliser le monde contre les islamistes et à préparer les interventions militaires en Afghanistan et en Irak.
L'argumentation de Robert Redeker a l'avantage d'être rustique : ceux qui émettent des doutes ou nient la version officielle des événements du 11 septembre sont “d'une insondable sottise“, témoignent d'une “vision délirante selon laquelle la réalité, jusque dans ses détails, fait l'objet d'une manipulation occulte dont la vérité est masquée à l'humanité. Ce conspirationnisme se développe à partir d'un usage dément du principe du doute.“ Sottise donc, démence et, pour faire bon poids, au bout de tout cela, “négationnisme“.
Une chose est absolument sûre : je ne connais pas l'entière “vérité“ sur les événements du 11 septembre, y compris ses arrières-boutiques, mais Redeker non plus.
A partir de là, le sujet est plutôt le suivant : que peut-on, que doit-on “croire“ de tout ce qu'on voit et entend, qu'il s'agisse de thèses officielles ou de thèses “complotistes“, sur ce sujet et sur d'autres ? N'en déplaise à ce Monsieur “philosophe“, la réponse n'a rien d'évident.
Devait-on croire Colin Powell lorsqu'il brandissait à la Tribune de l'ONU les “preuves“ photographiques de la réalité des armes de destruction massive mises au point par Saddam Hussein ? Devait-on croire les autorités françaises quand elles nous rassuraient en affirmant que le nuage de Tchernobyl avait le bon goût de s'arrêter pile aux frontières de notre pays ?
Doit-on croire ceux qui, dans la même phrase, disent leur foi en la démocratie et piétinent le suffrage universel lorsque son expression ne leur convient pas, comme l'a montré l'aventure du Traité européen ? Doit-on croire les publications de résultats maquillés des banques internationales lorsqu'elles tentent de minimiser ou de délayer leurs pertes liées aux subprimes ? Doit-on croire tel ou tel officiel lorsqu'il annonce des chiffres (sur l'insécurité, la croissance, le chômage, l'inflation) que la réalité dément quelques semaines ou quelques mois plus tard ? Doit-on croire tel média lorsque, volontairement ou par paresse intellectuelle, il simplifie, travestit ou masque le réel, dans son intérêt popre, celui de ses actionnaires ou celui de ses alliés politiques ? Etc, etc.
La réalité est que nous vivons dans un monde, soit-disant transparent, où la parole, officielle ou pas, vaut ce qu'elle vaut, mais guère plus.
Avec une nouveauté notable, fille de multipolarité et du multimedia : le pouvoir, ses secrets, ses mensonges, ses manipulations, ses informations ou sa parole, s'ils restent majoritairement aux mains des puissances de l'argent et de la politique, sont, de moins de moins, l'apanage exclusif des seuls “officiels“.
A partir de là, on peut concevoir que la confiance en la parole, officielle ou pas, fasse défaut et que le doute s'installe. C'est peut-être regrettable, sot et délirant, mais c'est comme ça.
Le doute n'est peut-être pas une si mauvaise chose dans la mesure où l'on ne se contente pas de s'y réfugier, mais si au contraire il constitue un bon motif à élucider ce qui en est l'objet ?
Quand j'ai un doute sur quelque-chose soit cette chose est sans importance et je passe, soit elle me semble justifier l'effort d'approfondir et je l'effectue.
J'ai l'impression que tu regrettes ces époques où l'on était contraint de croire et de n'émettre aucun doute sous peine de très graves "ennuis", jusqu'à la potence ou l'écartèlement, José ?
Pourtant même à ces époques certains ont douté et l'ont fait savoir.
Oui, la "transparence" est manipulée au point d'en devenir opaque : elle vaut peut-être les opacités d'antan, et justifie les mêmes interrogations et vigilances.
Rédigé par : jcm | 31 mars 2008 à 13:55
Redeker n'en est pas à son coup d'essai: il a dans d'autres tribunes traités les opposants à la guerre en Irak de "Vichysto-nazis" et à comparé les opposants aux réformes de Luc Ferry à des barbares motivés par une haine des intellectuels.
En fait, Redeker est d'abord et avant tout un élitiste excessif au point d'en devenir caricatural: dans sa vision du monde, il est l'un des plus brillants esprits qui soit, et toute personne qui n'est pas sur sa ligne fait forcément partie des 99,99% de demeurés qui le jalousent, lui et son intellect supérieur.
Le plus comique (ou tragique) dans l'histoire, c'est que la théorie du complot a été contredite de manière indéniable: pour chaque "argument" des conspirationistes (le kérozène en flamme ne suffit pas à faire fondre l'acier, donc il fallait mettre des explosifs dans les tours, on a pas trouvé les restes de l'avion crashé sur la pelouse du pentagone et des temoins n'ont pas vu l'avion donc c'était un missile) ont été largement contre-argumentés (la chaleur du kerozène suffit à dillater la super structure des tours qui devenait trop molle pour en supporter le poids, les restes de l'avion se sont encastrés dans les gravats des murs détruits du Pentagone et la demi-douzaine de témoins n'ayant aps vu d'avion est contredite par la centaine de témoins les ayant vu)de manière rigoureuse alors même que les différentes allégations conspirationnistes manquaient de leur côté de rigueur.
De plus, si on peut effectivement conclure:
1. à de graves manquements des USA dans la surveillance des mouvements intégristes (trop peu d'arabophones, l'eau apporté au moulin à propagande d'Al-Quaida par la politique étrangère US constament sous-estimmé)
et
2: à une indéniable malhonnêteté de l'admisnistration Bush après coup (mensonges concernant les justifications de l'invasion Irakienne, tortures pratiquées sur place, nombreuses campagnes de propagande mensongère en périodes électorales, etc...)
On a jamais eu le moindre commencement de preuve d'un complot: en fait, les soupçons de mesonges concernant les AMD ont été démontrés, les soupçons de tortures ont été démontrés, les soupçons d'écoutes illégales ont été démonrés, les soupçons de cooruption généralisée au sein du Parti Républicain ont été démontré... mais les soupçons de complot ne l'ont pas été.
Ainsi donc, Cotillard était effectivement à côté de la plaque, mais la tribune de Redeker, comme d'habitude basée sur le postulat du "je suis un génie et la terre entière est peuplée de crétins" fini par apporter du poid aux fantaisies conspirationnistes.
Rédigé par : Laurent Weppe | 31 mars 2008 à 15:06
Entièrement d'accords avec vous.
Que nos illustres intellectuelles médiatiques se mettent à juger des discours officiels occidentaux avec le même scepticisme que celui qu'ils s'octroient face à la Chine et à la Russie, et nous pourront alors les prendre au sérieux.
Quant à la notion de démocratie il est bien dommage qu'elle soit utilisé par des gens qui en sont si éloigné. Rappelons au passage que pour qu'une démocratie fonctionne correctement il faut une certaine égalité entre ses citoyens, nos élites ferait bien de relire Montesquieu et Rousseau pour voir à quel point l'occident n'est plus démocratique, et qu'il se rapproche dangereusement de l'aristocratie totalitaire.Remarquez les principaux adeptes de la démocratie de l'époque d'Athènes ou du 18ème n'étaient pas vraiment convaincu du bienfait de l'élection des représentant au suffrage électorale. Le vote finit par construire des oligarchies sur plusieurs générations, et certain se demande à juste titre s'il ne faudrait pas substituer le hasard au vote dans le choix des représentants du peuple pour être réellement une démocratie.
Rédigé par : yann | 31 mars 2008 à 15:07
Depuis longtemps, j'essaie d'interprèter les discours des media avec une question : quel est l'intéret de celui qui s'exprime à me faire croire ceci ou cela ?
Cela permet plus facilement ensuite de s'interroger sur la véracité de ce qui est dit. Il est toujours bon aussi de savoir à qui appartient le medium.
Quand aux discours des politiques > /dev/null , ou en bon français, à la poubelle.
L'histoire américaine à ceci d'intéresant qu'ils ont par le passé à de nombreuses reprise organisés l'attaque de leur pays (souvent de leurs navires de guerre) afin d'avoir une raison honorable de rentrer en guerre.
L'exemple le plus célèbre, c'est Pearl Harbour ; mais ce n'est pas le seul !
Rédigé par : bertrand | 31 mars 2008 à 16:59
Le point de vue de Robert Redeker, c'est la dénonciation quasi pavlovienne chez un certain nombre d'intellectuel, de la théorie du complot.
Pas un seul argument pour démonter les thèses conspirationnistes(fondées sur un certain nombres de contre-vérités sur la vitesse de chute des tours, les procédures supposées d'intervention, la pseudo-absence de débris d'avion etc...), mais un gros amalgame entre anti-Bush, partisan du complot, anti-américain, anti-sioniste et antisémite.
Pouah!
Rédigé par : Beurk | 31 mars 2008 à 21:21
Le point de vue de Robert Redeker, c'est la dénonciation quasi pavlovienne chez un certain nombre d'intellectuels, de la théorie du complot.
Pas un seul argument pour démonter les thèses conspirationnistes(fondées sur un certain nombre de contre-vérités sur la vitesse de chute des tours, les procédures supposées d'intervention, la pseudo-absence de débris d'avion etc...), mais un gros amalgame entre anti-Bush, partisan du complot, anti-américain, anti-sioniste et antisémite.
Pouah!
Rédigé par : Beurk | 31 mars 2008 à 21:22
Je me souviens d'une de ces chroniques anti-antipub qui valait le détour aussi, au Roro... Depuis, je ne le lis plus, trop mauvais pour ma tension ;-)
Rédigé par : dieudeschats | 02 avril 2008 à 13:19
Bouddha a dit : "ne crois pas aveuglément tout ce que l'on t'affirme, fusse le bouddha lui-même. Vérifie-le !"
C'est simple, c'est clair et c'est uniquement vrai. Vérifiez-le.
Rédigé par : Rey | 03 août 2009 à 14:23
Excusez de "flooder" comme on dit, mais ça me fait penser à la "pandémie" actuelle de gvrippe A(H1N1). Nous avons eu, récemment, la mort d'une jeune fille de 14, qui a suivi son infection par la grippe A. Or (!), il a pourtant été dit, au tout début de cette triste histoire, qu'elle était morte à cause d'une infection pulmonaire contractée AVANT la grippe A. En ce moment, on entend surtout la belle ellipse qui affirme qu'elle est victime de la grippe A. Ce qui est, bien sûr, totalement faux. Voilà comment on développe la panique chez ses concitoyens.
Rédigé par : Rey | 03 août 2009 à 14:27