Le discours solennel de Nicolas Sarkozy en clôture du Grenelle de l'environnement était, pour reprendre un de ses mots favoris, “remarquable“ : cet homme, qui n'était pas particulièrement sensible aux questions environnementales il y a un an encore, a produit là, en résumant les conclusions du Grenelle, un discours d'une grande intensité, riche d'ambition, de bonnes intentions et de propositions d'action.
Il est trop tôt pour les décrypter et les analyser toutes. Trop tôt, bien sûr, pour savoir dans quelles proportions elles seront suivies d'effets.
Une chose pourtant m'a frappé. Si par sa voix, l'Etat s'est réellement engagé, il a, d'une part, plutôt épargné les citoyens consommateurs (pas de limitation de la vitesse automobile, par exemple) et, d'autre part, fortement responsabilisé quatre types de partenaires, qui présentent l'avantage d'exempter l'Etat de nombreux efforts : l'Europe, les acteurs économiques, les ONG et les collectivités locales.
La première, l'Europe, sur nombre de sujets, n'est pas en retard dans ses intentions et ses règlementations : c'est plutôt la France qui l'est aujourd'hui dans leur application. Mais la communauté se voit demander de contribuer plus, notamment en autorisant une diminution de TVA sur les produits propres.
Les seconds, les acteurs économiques (producteurs industriels et agricoles, transporteurs, importateurs), se voient promettre une redéfinition des charges (taxer plus les pollueurs que le travail), demander des efforts importants, ce qui était souhaitable.
Mais sans qu'en soient toujours précisés l'ampleur, le coût, les modalités ou le calendrier (pas de décision prise sur la taxe carbone, pas de moratoire, mais gel des OGM, cet hiver, c'est-à-dire pendant les gelées -période précédant les plantations-, extension du principe de responsabilité aux maisons-mères des entreprises pollueuses, étiquetage des produits, taxe sur les produits étrangers en provenance de pays non respectueux de Kyoto, réduction de 50% de l'usage des pesticides sur 10 ans -sous condition-, multiplication des surfaces agricoles dédiées au bio, etc).
Les troisièmes, les ONG, se voient reconnaître “une place dans les institutions“, ce qui est effectivement révolutionnaire, et présente l'avantage d'être gratuit pour l'Etat qui s'engage, par ailleurs, à simplifier l'administration environnementale en regroupant, par exemple, les 45 instances d'expertise existantes.
Les quatrièmes, les collectivités territoriales (régions, départements, communes), se voient reconnaître de vraies responsabilités (dans le transport, le logement, etc), dont on peut craindre qu'elles ne se traduisent par une hausse sévère des impôts locaux.
Les députés
ont en effet entériné vendredi dernier une diminution de la dotation de l'Etat aux
collectivités territoriales, inscrite dans le projet de loi de Finances
2008 : l'effort demandé aux collectivités
territoriales est chiffré à 400 millions d'euros par le rapporteur du
budget, Gilles Carrez (UMP). Les concours de l'Etat se montent au total
à 65 milliards d'euros, selon lui.
Il faut être juste : l'Etat s'est également engagé, en annonçant, par exemple des efforts d'investissement sensibles sur les équipements collectifs (2.000 km de lignes de TGV, reconversion de lignes classiques en voies de ferroutage, développement du merroutage), un effort de recherche de 2,3 milliards d'Euros sur l'énergie (pour chaque euro investi dans l'énergie nucléaire, 1 euro sera investi dans les énergies renouvelables), de 4,6 milliards d'Euros sur les transports (en s'engageant d'ailleurs à rebours de la politique menée sous Chirac).
Au total, si ces dispositions ne restent pas lettre morte (rognées par les lobbies et les députés, ou sans mesures d'accompagnement ou de financement), elles constituent un tournant et l'amorce d'un véritable changement dont on ne peut que se féliciter. Mais il s'agira de rester particulièrement vigilants sur les modalités.
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