Il y a cinq ans, un recensement indiquait que la population indienne était en train de passer le cap du milliard d'individus.
Un spécialiste indien m'avait alors invité à considérer ce chiffre avec prudence : la marge d'erreur ou d'imprécision (due soit aux mensonges des déclarants -surtout dans les campagnes-, soit à la difficulté d'évaluer les populations migrantes ou les habitants des bidonvilles) était probablement de l'ordre de 30% ; la population indienne était, affirmait-il, plus près d'1,3 milliard d'individus que du milliard.
La lecture récente du Grand bluff chinois, de Thierry Wolton, met, cette fois, le doute sur la réalité du “miracle“ économique de l'Empire du milieu : “Alors, totalement bidon, les statistiques chinoises ? Non, mais survitaminées, gonflées pour des raisons aussi bien économiques que politiques. Le pouvoir est condamné à afficher des chiffres de croissance record pour couvrir une réalité qui lui échappe. Essayons de décrypter. On peut estimer que 1 à 2% de la croissance annoncée est factice, pour cause de mensonges à tous les niveaux de la hiérarchie. 2 à 3% supplémentaires représentent la fabrication de produits invendables, sortis des entreprises d'Etat obsolètes. Les entrepôts de ces usines sont plein de marchandises mises au rebut. Enfin 3 ou 4% sont nécessaires pour absorber l'augmentation anuuelle de la population active. Si l'on additionne le tout, 8% de croissance sont un minimum nécessaire pour tenir compte de l'ensemble de ces pesanteurs, afin que l'économie n'entre pas en récession...
“... Ce qui fait dire à Cheng Xiao Nong [un économiste élevé dans le sérail du pouvoir et réfugié aux Etats-Unis depuis les événements de Tian'anmen] que 7% de croissance chinoise équivalent à 3% de croissance américaine... En Chine, [7%] c'est la ligne en-dessous de laquelle le pays peut plonger...“
Plus près de nous, chacun sait que l'indice des prix de l'INSEE ne reflète que partiellement la réalité de l'évolution des prix, que chacun peut constater dans sa consommation quotidienne.
Si l'on en croit ces trois exemples (dont les deux premiers ne sont pas “rien“), la description du monde réel à travers les chiffres et les statistiques est, pour le moins, sujette à caution.
Fausse science, science approximative, manipulations, désinformation, mensonges officiels, entrechoquent des chiffres innombrables qui dessinent au total un réel furieusement virtuel (on disait autrefois un monde d'illusion).
L'art de la politique consiste à naviguer à vue entre ces écueils.
Jusqu'au XXe siècle, les dirigeants -de formation plutôt littéraire- s'accommodaient tant bien que mal de l'imprécision de l'information, par des croyances, des valeurs, de l'intuition, c'est-à-dire une certaine forme de poésie.
Au XXIe siècle, les dirigeants -de formation plutôt scientifique- doivent s'acccommoder, avec moins de poésie, d'une information plus précise mais probablement faussée.
Dans les deux cas, le réel ne se laisse pas apprivoiser facilement.
J'ai même récemment oui dire qu'il se construisait en Chine pas mal d'immobilier à la seule fin de soutenir l'économie.
Le processus est destiné à soutenir l'activité et la croissance des industries lourdes (ciment et acier en particulier) en lui fournissant des débouchés artificiels.
A la question posée aux autorités chinoises : "pourquoi construire un immobilier qui ne trouvera pas preneur" la réponse est ce soutient à l'industrie.
A la question : "que ferez-vous de ces immeubles vides" elles répondent qu'ils vieilliront puis seront réhabilités, ce qui donnera du travail et soutiendra certaines branches de l'économie.
Entendu ces derniers jours de la part d'une personne qui semble assez bien connaître les arcanes de l'économie chinoise.
Jusqu'où les dés sont-ils pipés ?
Rédigé par : jcm | 27 juin 2007 à 12:12
les dés sont pipés, dés le moment où on croie au jeux de dés.
Rédigé par : luluberlu | 28 juin 2007 à 12:47