Dans l’idéal, j’aurais préféré autre chose : quelqu’une ou quelqu’un qui aurait posé des questions de fond et en aurait déduit des réponses de surface, plutôt que l’inverse.
Au lieu de quoi, nous avons été gratifiés de ce spectacle déroutant où nombre de questions fondamentales ont été escamotées, où les candidats, cantonnés –par eux-mêmes, leurs partisans, les médias et leurs auditoires- dans un rôle de “techniciens de surface“, ont posé en nettoyeurs superficiels de la société et de l’Etat, évitant soigneusement les écuries d’Augias, les coins, les recoins et le dessous des meubles.
Mais, après tout, la hauteur de vue est un art difficile, impossible peut-être, quand les temps sont bas de plafond. M’est avis cependant que nous n’en ferons pas longtemps l’économie.
Restent donc deux candidats. Sans aucun doute, dans ce contexte, les meilleurs de leur camp : il n’y a pas de meilleur conservateur que Nicolas Sarkozy ; il n’y a pas de meilleure réformatrice que Ségolène Royal.
Non que l’un ou l’autre soient exceptionnels ou irremplaçables, mais personne n’est survenu pour les concurrencer sur le territoire qu’ils avaient préempté, celui de la rénovation de leur propre famille : ni Michèle Alliot-Marie, ni Dominique de Villepin, ni Laurent Fabius, ni Dominique Strauss-Kahn… Ni François Bayrou, qui voulait former une nouvelle famille sur les décombres des deux autres, en s’appuyant sur ce qu’il avait sous la main, un espace étroit peuplé de faux-frères.
Restent donc deux candidats.
Nicolas Sarkozy, doux aux forts, dur aux faibles
De Nicolas Sarkozy, au-delà du personnage que je ne juge pas, je ne partage ni les choix atlantistes en politique extérieure (qui le place loin de la tradition gaulliste et loin sans doute d’une vision d’avenir pour le monde), ni les choix ultra-libéraux en économie et en politique sociale, ni les choix réactionnaires sur les sujets les plus divers (environnement, inné-acquis, égoïsme de classe, etc).
Le libéralisme qu'il défend relève d’une “mode“ vieille de 30 ans, dont chacun peut mesurer à quel point, si elle a permis la création de richesses, c’est dans un esprit d’égoïsme et d’individualisme forcené.
Il s’agit de donner toujours plus aux riches en dépouillant les pauvres, de tirer toujours plus de lignes de crédit, de prélever toujours plus de ressources naturelles en en privant les générations futures.
Le libéralisme qu’il défend fonctionne au prix de la dévalorisation du travail, de la sur-valorisation du capital, de la sur-consommation des ressources naturelles, de la destruction massive de l’environnement, du lien social, de la solidarité, des services publics et de l’accroissement des inégalités, en France comme ailleurs.
Le modèle sociétal défendu par Nicolas Sarkozy, repose sur l’absence de contraintes en économie et l’usage de la contrainte d’Etat en politique.
C’est cette double identité qui distingue les libéraux “conservateurs“ d’aujourd’hui de la grande tradition libérale “progressiste“ du XIXe siècle.
Quoiqu’il en dise et quelles que soient les flatteries qu’il adresse aux travailleurs-travailleuses, le modèle proposé par Nicolas Sarkozy est doux pour les forts et dur pour les faibles ; il prône la liberté pour les premiers et son aliénation pour les seconds.
Il le fait sans complexes. Avec une gourmandise de pouvoir, un narcissisme et une brutalité d’expression qui augurent mal de son sens du dialogue social et de la démocratie. Nicolas Sarkozy fait peur. D’autant que ses opinions, ses intuitions, ses analyses, sont souvent infondées.
Que sera la politique étrangère de celui qui se flatte d’être appelé “Sarko l’américain“ ? Curieux sobriquet pour qui veut établir un “Ministère de l’immigration et de l’identité nationale“.
Le projet de Nicolas Sarkozy, au total plus ancré dans le XIXe siècle dans le XXIe. dessine un monde ancien plus qu'il n’esquisse une vision d'avenir. A moins que l’avenir ne soit très sombre. Mais dans ce cas, il se passera de mon approbation. Donc, décidément, je ne voterai pas pour lui.
En face, Ségolène Royal, propose des choix très différents.
Ségolène Royal, un pari sur l'avenir
Si l’on peut croire sans hésitation Nicolas Sarkozy quand il peint son rêve, peut-on croire Ségolène Royal ? Son appartenance à une famille politique qui n’a pas prouvé, depuis 25 ans qu’elle fréquente les allées du pouvoir, sa capacité à réformer la France, durablement et en profondeur, peut faire douter.
L’excès du clientélisme, la notabilisation de ses élites, la générosité sociale dispendieuse et contre-productive, l’adhésion discrète mais constante au libéralisme de marché dépouillé du contrepoids de l'Etat, tout cela n’est pas engageant.
Mais au crédit de Ségolène Royal, il faut d’abord porter la distance (d’origine “caractérielle“, disent ses adversaires) qu’elle a mis entre elle et son parti, dont elle a déjà secoué les pesanteurs. Son caractère, indéniable au terme de cette campagne où rien ne lui a été épargné, son indépendance d’esprit, l’originalité de son approche, voire certains de ses aspects baroques, me rassurent plus qu’ils ne m’inquiètent.
La France a peut-être besoin de cette fantaisie-là, si elle est porteuse de mouvement, plus que de raison, si elle est paralysante.
Je ne m’appesantirai pas sur le procès en incompétence qui lui est fait : il est stupide et malhonnête.
Qui est incompétent ? Ségolène Royal ou Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur qui allume des émeutes en banlieue et laisse grimper de 40% en cinq ans les agressions à la personne ?
Qui est incompétent ? Ségolène Royal ou Nicolas Sarkozy, ministre en exercice qui critique à New York la seule action d’éclat du gouvernement auquel il appartient, la politique étrangère de la France sur l’Irak ?
Qui est incompétent ? Ségolène Royal ou Nicolas Sarkozy, héritier honteux d’un gouvernement et d’une législature au cours de laquelle, sans projet, sans réalisation, sans investissement majeur, la dette a dramatiquement grandi ?
Au-delà, plus que des promesses ou un programme auxquels je ne crois guère, six caractéristiques de la campagne de Ségolène Royal dessinent des convictions réelles et des méthodes de gouvernement modernes dont, quoiqu’il arrive, nous ne ferons pas l’économie.
- elle a mis, avec constance, l’environnement, au cœur de ses propositions et y voit une opportunité pour redéployer l’ensemble de l’économie ;
- elle a compris que les indicateurs économiques actuels (inflation, croissance, etc) doivent être redéfinis et, avec eux, les objectifs de développement de notre société ;
- elle est favorable à une répartition différente des fruits du travail et du capital ;
- elle est favorable à une nouvelle répartition des pouvoirs, à une décentralisation et une régionalisation plus poussées et, de manière générale et à un rapprochement des centres de décision et des lieux de vie ;
- elle est favorable à un gouvernement, non en fonction d’idéologies et d’abstractions, mais par des décisions concrètes, pragmatiques, lisibles, visibles ;
- elle prône une démocratie élargie et apaisée, non réduite à un vote quinquennal valant blanc-seing, mais faisant appel à l’intelligence collective et acceptant l'évaluation des gouvernants.
Je crois sincèrement que tout ça vaut le coup d’être tenté. On aura peut-être des surprises en cours de route, mais l'autre choix n'en laisse augurer aucune de bonne ☺
A tous ceux qui pensent maintenant a l EXIL POLITIQUE, une recommandation: l' ALLEMAGNE, pays dans lequel les Français votaient traditionnellement a droite et qui ont voté massivement au centre-gauche le 22 avril dernier (37 % ROYAL - BAYROU 28 %) contre la droite-extreme SARKOZY (25 %) et LE PEN ( 2%).
______________________________
PS pour les Français qui n ont plus les moyens de déménager ils devraient eux se souvenir qu' ils sont - en qualité de citoyens de l Union Européenne - protégés la Charte des Droits fondamentaux.
Rédigé par : unionsbuerger | 05 mai 2007 à 19:40
A tous ceux qui pensent maintenant a l EXIL POLITIQUE, une recommandation: l' ALLEMAGNE, pays dans lequel les Français votaient traditionnellement a droite et qui ont voté massivement au centre-gauche le 22 avril dernier (37 % ROYAL - BAYROU 28 %) contre la droite-extreme SARKOZY (25 %) et LE PEN ( 2%).
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PS pour les Français qui n ont plus les moyens de déménager ils devraient eux se souvenir qu' ils sont - en qualité de citoyens de l Union Européenne - protégés la Charte des Droits fondamentaux.
Rédigé par : unionsbuerger | 05 mai 2007 à 19:42
unionsbuerger, tu exageres un tantinet, un peu de valeriane ? ( et bon voyage )
Rédigé par : sophie | 05 mai 2007 à 20:41
"Mais, après tout, la hauteur de vue est un art difficile, impossible peut-être, quand les temps sont bas de plafond. M’est avis cependant que nous n’en ferons pas longtemps l’économie."
À mon humble avis, nous n'attendrons pas 2012. J'ai, d'ailleurs, la faiblesse de croire que si Sarkô est élu, le "réveil" sera plus rapide. Sous quelle forme, c'est une autre histoire. Mais cela fait bien longtemps que la France n'a pas été secouée par un "collecto-choc". 1789, 1830, 1848, 1871, 1914, 1936, 1940, 1945, 1968, en quelle année le suivant ?
Rédigé par : Francis | 05 mai 2007 à 22:25
on voit bien que vous ne savez pas ce que c'est que d'etre employée par des patrons qui se disent socialistes... 35 heures à faire le boulot des autres, 35 heures non réclamées par le peuple, 35 heures et pas d'embauches supplémentaires.. hé bien moi prolo qui a connu cela je n'ai pas envie que ça continue et je ne gobe pas ce que dit Madame Royal
Rédigé par : petiteProlo | 05 mai 2007 à 23:34
J'ai été patron et plutôt proche de la sensibilité socialiste.
Et, pour tout vous dire, les 35 heures -ou plutôt la manière dont a été expliquée et mise en application la réduction du temps de travail-, le changement de mentalité qu'elles ont cristallisé face au travail (pour les patrons, comme pour les cadres ou les salariés) et leur coût social, ont largement contribué à ce que je me casse de ma boite il y a 4 ans.
Mais on va peut-être pas passer la vie à ergoter sur les 35 heures. Ça, c'est fait : même Sarko ne reviendra pas dessus :)
Et j'ose espérer que Ségolène Royal sera plus pragmatique que ses prédécesseurs.
Rédigé par : José | 06 mai 2007 à 02:34
Sacrelotte de saperlipopette, dernier jour avant l'apocalipse, le chaos, la fin du mon-on-onde si sarko est élu !!! pas trop peur les gars ? ;)) tremblante et rigolarde, je file soigner ces malheureux humains que les dieux ont abandonnés, dormez bien bonnes gens :)))
Rédigé par : sophie | 06 mai 2007 à 05:23
Oui, Sophie, "derniers jours avant l'apocalypse" en quelque sorte, c'est un peu cela !
Et cela m'enragerait (que Sarko soit élu) sans me faire vraiment peur finalement : il me semble très difficile d'éviter cette apocalypse...
Car d'un certain point de vue nous pouvons encore supposer que nous disposons d'un choix entre aubaine et catastrophe, au niveau mondial.
Informe-toi bien, Sophie, de ce que nous pouvons savoir de la question des changements climatiques (car c'est là le plus important, et non la façon dont l'un ou l'autre des candidats résorbera ou accroîtra la dette du pays, nous traitera avec plus ou moins de violence ou d'attention) : cette question nécessite de la réaction rapide, mondiale, forte, locale et globale...
Et l'on apprend chaque jour que la situation climatique est plus dégradée que nous le pensions la veille, que l'Arctique fondrait plus vite que supposé, que la plaine du Pô est en cours d'une dramatique aridification, que...
Cela tandis que nous savons que la lutte contre ce réchauffement sera difficile quoi que nous fassions.
Sur le plan intérieur aujourd'hui nous ferons un choix final pour 5 ans avec en présence 2 candidats qui nous orientent fort différemment par rapport à ce problème.
Il est très regrettable que Royal, dans sa campagne et dans son débat avec Sarko, n'ait fait qu'effleurer ce sujet sans s'attarder ni se montrer suffisamment claire sur ce point : vérifie, elle a pourtant choisi l'aubaine contre la catastrophe.
Ce choix est présent dans son programme et a été mentionné lors du débat, avec la création de "centaines de milliers d'emplois" (débat) à la clef de la lutte contre le réchauffement climatique qu'elle entend mener...
Tandis que Sarko passe en glissant très vite sur le sujet avec des mesurettes négligeables.
Or le France et le Monde entier ont besoin de dirigeants qui sauront faire ce choix entre "aubaine et catastrophe" et seront les moteurs du changements dans lequel nous devons absolument nous lancer, pour que les années et décennies à venir ne soient pas TROP dures, car elles seront de toutes façons assez rudes.
Ceci en raison de l'inertie du climat : les changements que nous voyons aujourd'hui à l'oeuvre se poursuivront et s'intensifieront même si nous agissons vite et fort.
Le choix que nous ferons aujourd'hui est donc assez crucial, entre une personne qui envisage de se montrer assez active dans ce domaine et une autre qui s'en bat les flancs et nous fera perdre 5 précieuses années.
Car de nombreuses voix s'entendent pour nous dire qu'il ne nous reste que jusqu'à 2020 environ pour renverser la vapeur : c'est très court !!!
Et nous devons choisir entre 2 personnes qui partagent un autoritarisme indéniable.
L'une, danseur étoile au bal des faux culs, joue depuis quelques jours une douceur qu'on ne lui connaissait pas, l'autre nous propose une dynamique "participative" que, dans sa détermination (et elle sait être véritablement déterminée sur le long terme), elle serait bien foutue capable de mettre réellement en oeuvre.
En gros nous avons le "pater familias" autoritaire et qui ne veut voir qu'une tête face à un guide qui prône l'auto-adaptativité et la coordination en temps réel entre la société et ses dirigeants.
Dans le premier cas nous n'aurons qu'à nous taire, dans le second nous pouvons supposer que nous aurions un peu plus souvent la parole et la possibilité d'influer sur les décisions qui engagent nos avenirs.
Une façon peut-être d'expérimenter à l'échelle d'un pays une certaine forme "d'intelligence collective" ?
D'un côté nous avons une majorité de français qui refusent les OGM, s'opposent à une nucléarisation plus intense du pays etc... et deux candidats qui proposent des voies fort différentes dans ces domaines, et bien d'autres.
Faudrait-il que les français soient incohérents, et à quel point, pour placer à leur tête celui qui affiche l'autorité la plus intransigeante !!!
Oui, il faut éviter l'apocalypse, et ce n'est pas Sarko qui nous permettra de le faire : il est alors, en quelque sorte, le commis voyageur de cette apocalypse.
Rédigé par : jcm | 06 mai 2007 à 07:19
oui, jcm, je me renseigne, surtout sur les blogs et sites de gauches, parceque j'aime les convictions que je ne partage pas, elles m'aident a temperer les miennes. Mais je ne crois pas que segolene soit la solution a ce qui menace notre planète, ni elle, ni sarko.et ne crois pas non plus au chaos ou a l'apocaligrecpse pour demain.
Rédigé par : sophie | 06 mai 2007 à 12:33
gauche, sans s ( pas fait expres loll)
Rédigé par : sophie | 06 mai 2007 à 12:34
Ségolène n'est assurément pas LA solution à cette question mais des deux c'est elle qui nous mène dans la meilleure direction de ce point de vue.
Sur le fait de ne pas "croire au chaos" ou à l'apocalypse, n'as-tu pas entendu dire qu'il valait mieux prévenir que guérir ?
Si oui fais la liste des signes susceptibles de nous faire penser que le monde atteindra un état d'équilibre plus satisfaisant dans les années à venir, puis fais celle des signes contraires et compare...
Une fois cela fait tu pensera peut-être que l'idée de prévenir devrait être retenue...
Rédigé par : jcm | 06 mai 2007 à 13:46
Craindre n'est pas savoir, interpreter n'est pas entendre,convaincre n'est pas comprendre. nom d'un chien, le chaos commence, j'ai perdu mes clefs
Rédigé par : sophie | 06 mai 2007 à 15:56