Hugo Chavez a donc été réélu hier président du Vénézuéla, avec 61% des voix.
Après la décennie 70 violente, entre dictatures militaires et mouvements de guérilla, une décennie 80 sous le signe d'une ouverture sociale démocrate et les années 90 marquées par l'application calamiteuse de modèles écconomiques néo-libéraux, l'Amérique Latine vire à gauche.
Avec le Brésil de Lula (réélu en 2006), la Bolivie d'Evo Morales (élu en 2006), le Nicaragua de Daniel Ortega (réélu en 2006), l'Equateur de Rafael Correa (élu en 2006), le Chili de Michèle Bachelet (élue en 2006), le Pérou d'Alan Garcia (élu en 2006), le Panama de Manuel Torrijos (élu en 2004) et même l'Argentine de Nestor Kirchner (élu en 2003), c'est, en moins de 2 ans, une grande partie de l'Amérique Centrale et de l'Amérique du Sud qui a basculé à gauche, à la suite d'élections démocratiques.
Seul (avec toutefois le Guatemala et le Honduras), malgré une agitation sociale très importante, le Mexique est resté ancré à droite, après l'élection -contestée pour fraude- de juillet dernier.
A l'origine de ce mouvement, un profond mécontement des populations qui n'acceptent pas les effets d'un “libre échange“ déséquilibré et d'une mondialisation d'inspiration libérale, génératrice, depuis les années 80, d'un appauvrissement sensible et d'une croissance des inégalités dans tout le continent.
Ce mouvement, dans sa traduction électorale diverse, de la plus tempérée (Argentine, Chili) à la plus radicale (Vénézuéla) en passant par la plus pragmatique (Brésil), signe également la faillite actuelle des Etats-Unis dans une de leurs zones d'influence traditionnelle.
Quatre questions seront intéressantes à suivre au cours des prochains mois et des prochaines années : Ces nouveaux gouvernements pourront-ils modifier les équilibres économiques et sociaux, parviendront-ils à définir de nouveaux modèles de développement ou se perdront-ils, comme tant de leurs prédécesseurs dans l'incantation et la corruption ?
Les Etats-Unis auront-ils la volonté ou seront-ils en mesure de déstabiliser ou de collaborer avec ces nouveaux gouvernements ou se replieront-ils dans la défense d'un pré-carré, essentiellement réduit au Mexique ?
L'Europe, via l'Espagne, s'impliquera-t-elle plus en Amérique Latine, pour se substituer à l'influence américaine ? Ou est-ce la politique étrangère chinoise qui montera en puissance dans la région au cours des prochaines années ?
Les Chinois sont déjà assez affairés avec l'Afrique... quoique l'Amérique du Sud possède aussi des gisements intéressants dans son sol !
Rédigé par : dieudeschats | 04 décembre 2006 à 14:13
Votre billet sur l'Amérique Latine change agréablement de ces brûlots chávistes souvent produits par les derniers carrés de ce qui reste d'une ultra-gauche reconvertie en alter.
La (triste) réalité est que le Venezuela de Chávez ressemble, pour l'essentiel, aux autres pays d'Amérique Latine, quels que soient leurs régimes politiques. Les mêmes maux les accablent tous : extrêmes inégalités de revenus, corruptions endémiques, niveaux de violences élevés, pour n'en citer que trois. Le Venezuela, de Chávez, ne s'est pas amélioré sur ces trois critères. Ou si peu... Et va sans dire que l'élection de Rosales n'aurait rien changé...
La même chose peut être dite du Brésil de Lula, de l'Argentine de Kirchner ou du Chili de Bachelet. C'est pourquoi il est hasardeux de parler de "droite" ou de "gauche" pour définir les politiques qui y sont suivies.
Et d'ailleurs, peu importent les étiquettes. L'essentiel est aileurs : que des changements positifs finissent par se produire dans nos pays (je vis au Brésil) et l'on pourra peut-être commencer à accorder quelque crédit aux leaders politiques latino-américains...
Sur la Chine, vous n'avez pas tort. Elle est de plus en plus présente en AL et particulièrement au Brésil : investissements sino-brésiliens, relations commerciales en forte croissance et pour l'instant équilibrées, mais aussi volonté de la Chine d'étendre son influence sur le plan militaire...
Rédigé par : Francis J. | 07 décembre 2006 à 19:17
Je pense que la grille de lecture "liberalisme - mondialisation" est plutot europeenne, mon sentiment a lire les blogs locaux que c'est plutot la possibilité de virer au maximum les kleptocrates plus ou moins sanguinaire du pouvoir maintenant que les USA n'ont plus l'air de les secourir immédiatement en instaurant ou maintenant des regimes oppressifs.
La gauche locale "nouvelle" etant jugée moins pire que les droites historiques (ou gauche style PRI - Mexique).
Rédigé par : Laurent GUERBY | 08 décembre 2006 à 20:44