L'arbre du Tule, près de Oaxaca (Mexique), un cyprès 'taxodium mucronatum', de 2000 à 3000 ans, d'un diamètre de plus de 14 mètres, considéré comme le plus vieil arbre du monde.
La région de Oaxaca, au centre du Mexique, est l'une des plus merveilleuses qui soient. Quatre mondes s'y superposent et y cohabitent :


- l'Amérique pré-colombienne, si vivante encore dans les cœurs des indiens descendants des zapotèques, si présente par les sites archéologiques de Mitla et de Monte Alban ;
- l'Amérique hispanique coloniale, avec sa belle architecture baroque et son pétulant catholicisme, imprégné de mythes pré-colombiens ;
- le Mexique indépendant et révolutionnaire du XIXe et du début du XXe siècle, qui a donné son nom complet à Oaxaca de Suarez (du nom de Benito Suarez, 1808-1873, premier président amérindien du Mexique) ;
- et le Mexique moderne, trop souvent poubelle de l'Amérique yankee, sillonné par les épaves repeintes de belles américaines -Mustang, Cadillac et autres Chevrolet- des années 60 et 70.
On n'en a pas encore parlé ici, à tort : depuis six mois, Oaxaca, ville d'environ 260.000 habitants recensés (il est probable qu'il y en ait en réalité deux à quatre fois plus), capitale de province au centre du Mexique, est le théâtre d'événements d'une extrême gravité, qui confirment l'agitation actuelle du Mexique et de l'Amérique centrale.
Le mouvement a commencé, le 22 mai dernier, par une grève des 70.000 enseignants de la province, portant sur des revendications salariales. Le 14 juin, une répression violente (le conflit compte, à date plus de 14 morts, de nombreux disparus) a radicalisé les enseignants et rassemblé autour d'eux une grande partie de la population locale, qui a exigé la démission du gouverneur de la province, Ulises Ruiz Ortiz, figure de l'ancien parti gouvernemental (le PRI, Parti Révolutionnaire Institutionnel), convaincu de fraude électorale, de corruption et autres délicatesses.
Les insurgés ont occupé pacifiquement la ville et plus de 30 mairies avoisinantes. Près de 350 organisations, communautés indigènes, syndicats et associations civiles ont formé l’Assemblée populaire du peuple de Oaxaca (APPO).
Depuis, Oaxaca vit en situation pré-révolutionnaire et la désobéissance civile s'y métamorphose en un soulèvement populaire chaque jour plus radical : une traditionnelle lutte de protestation se transforme peu à peu en un embryon de gouvernement alternatif.
Au niveau national, la censure filtre complètement les informations. Au niveau international, même silence jusqu'il y a quelques jours : le 27 octobre, des affrontements entre insurgés et milices du gouverneur (en chemises rouges, ci-dessus), ont fait trois morts, dont un cameraman de Indymedia.org (ci-contre).
Face à des événements qui pourraient faire tache d'huile, le gouvernement fédéral de Vicente Fox a décidé hier l'intervention des forces armées. Aussitôt, des barricades ont été érigées sur les principales avenues de Oaxaca. Simultanément, les leaders de l'APPO insistent sur le caractère pacifique de leur protestation et appellent aujourd'hui à une manifestation : “Nous ne voulons pas d'affrontement avec la PFP (police fédérale préventive, anti-émeutes), nous allons donner une leçon de civisme au peuple mexicain.“ A suivre.
Des revendications salariales totalement justifiées, si je dois en croire ce que j'ai lu et vu (reportages télé), dans une région où sévit largement une assez grande misère.
A noter aussi, d'après ces infos, la volonté très nettement marquée dans les esprits et les faits, d'obtenir des changements par une revendication pacifique, absolument non violente : refus des armes, des cocktails molotov etc... jusqu'à maintenant, c'est à dire depuis plusieurs mois déjà d'un mouvement très suivi par une majorité de la population, dans des conditions difficiles.
Le comportement du gouvernement mexicain est ici tout aussi "inqualifiable" que le comportement du gouvernement équatorien (et des compagnies pétrolières) au Sarayaku, où une résistance également pacifique perdure depuis quelques années sans grands succès ni relais internationaux.
Rédigé par : jcm | 29 octobre 2006 à 16:05
Merci d'en parler enfin.
Quelques sources d'infos (attention, ces sources ne prétendent pas à l'objectivité et sont engagés depuis longtemps déjà dans une "lutte pour l'humanité et contre le néo-libéralisme".) :
- ouvaton
- chiapas.indymedia
- risal.collectifs
Rédigé par : casabaldi | 29 octobre 2006 à 18:27
C'est une remarque un peu hors-sujet, mais en fait l'arbre le plus vieux du monde semble être californien.
Rédigé par : EL | 29 octobre 2006 à 19:03
OK, j'ai tardé... Faut bien dire qu'il n'y a pas que moi et que le sujet n'a pas passionné les foules jusqu'ici. Entre autres, parce que mis à part les sites dont tu donnes le lien, il n'a donné lieu qu'à trois papiers courts dans “Le Monde“ et à un ou deux, dans “Libé“, pas forcément bien inspirés.
Il y a deux ou trois heures (il est actuellement 19 heures, heure de Paris et le décalage horaire doit être de 7 heures avec Oaxaca), 3500 policiers de la PFP (forces anti-émeutes), appuyés par des tanks légers, renforcés par 300 membres de la police militaire, répartis en 26 groupes, ont pénétré dans les camps de l'APPO.
Plusieurs milliers de soldats sont, par ailleurs, déployés dans la région (source
La Jornada)
Ça risque d'être très chaud dans les heures qui viennent. Merci de relayer.
Rédigé par : José | 29 octobre 2006 à 19:16
Il y a eu également ceci : Mexique : résistance civile à Oaxaca et, désolé Casabaldi de l'affirmer, la télé vaut parfois le coup d'oeil.
Dommage que ces 12 minutes ne soient a priori pas disponibles sur le Net ...
Rédigé par : jcm | 29 octobre 2006 à 19:28
@EL : possible... Dans les deux cas, malgré mon grand âge, je n'étais pas encore là. L'arbre de Tulé est donné pour avoir 2.000 à 3.000 ans.
Celui auquel tu fais référence, nommé Methuselah (Mathusalem), est donné pour avoir 4.838 ans et semble être le plus vieil organisme vivant. Merci de l'info :)
Rédigé par : José | 29 octobre 2006 à 19:36
Le 30 juin 2006 :
La bataille des enseignants d’Oaxaca, puis le 11 Août 2006 : MEXIQUE
CRAINTES POUR LA SÉCURITÉ, au lendemain de la mort d'un participant.
En "parler enfin" ?
Certes l'info était disponible depuis 4 mois en français presque sous nos yeux, mais difficile de tout voir.
Et il y a eu ceci, rediffusé ces jours-ci mais qui date de 2005 : Les Indiens contre les rois du pétrole (extraits sur la page), qui n'a pas eu grands échos sur les blogs...
Et combien dans le même style ?
Rédigé par : jcm | 29 octobre 2006 à 19:45
Pas de souci jcm, je disais "enfin", parce qu'effectivement, c'était un peu calme plat sur ce sujet un peu partout.
Or, nous sommes nombreux à être au courant depuis longtemps ; j'en avais déjà parlé à José lors d'une alerte rouge de l'EZLN (mai 2006)
http://cspcl.ouvaton.org/article.php3?id_article=300
puis en juin, après le premier mort à Oaxaca.
http://cspcl.ouvaton.org/article.php3?id_article=317
Voilou.
"enfin" n'était pas critique du tout, je suis très content de voir cette info émerger du silence. enfin.
Rédigé par : casabaldi | 29 octobre 2006 à 20:16
un bon article de la presse non affiliée au PPA : http://www.cequilfautdetruire.org/article.php3?id_article=1148
VIVE L'APPO, SOUTIEN DEVANT LES AMBASSADES MEXICAINES COMME A PARIS HIER SOIR, OCCUPATION DE CONSULATS COMME A BARCELONE HIER MIDI, REAPPROPRIATION DE NOS VIES COMME A OAXACA HIER AUJOURD'HUI ET DEMAIN...
Rédigé par : J. | 31 octobre 2006 à 15:46