Je me suis amusé à un petit exercice délassant et riche d'enseignements.
En comparant le PIB des Etats et le chiffre d'affaires des plus grandes entreprises internationales, on s'aperçoit que sur les 100 ensembles économiques les plus importants au monde (et sous réserve de l'exactitude de mes sources), 51 sont des entreprises et 49 seulement des Etats (sur 192 adhérents à l'ONU).
Il serait plus cohérent et plus instructif encore de comparer les PIB des pays avec la marge brute des entreprises, les profits des unes et la balance commerciale des autres ou l'état de leur équilibre budgétaire. Mais les données me manquent. Ce sera pour une autre fois :)
En tout cas, une conclusion s'impose, pour rester sobre : le pouvoir des Etats est devenu relatif.
PIB 2004 (en bleu) et chiffres d'affaires 2005 (en rouge) des 100 plus grands ensembles mondiaux, exprimés en millions de dollars US
1 États-Unis 11 734 300 51 Volkswagen 118 376
2 Japon 4 671 198 52 Malaisie 118 318
3 Allemagne 2 754 727 53 Israël 116 905
4 Royaume-Uni 2 133 019 54 Fortis 112 351
5 France 2 046 292 55 Crédit Agricole 110 764
6 Italie 1 680 112 56 American Intl. Group 108 905
7 Chine (Rep. pop) 1 653 686 57 Venezuela 108 163
8 Espagne 1 041 338 58 République tchèque 107 015
9 Canada 993 443 59 Singapour 106 822
10 Corée du Sud 680 409 60 Émirats arabes unis 104 204
11 Mexique 675 254 61 Pakistan 103 421
12 Inde 665 071 62 Generali 101 403
13 Australie 618 021 63 Hongrie 100 371
14 Pays-Bas 607 531 64 Siemens 100 098
15 Brésil 603 783 65 Sinopec 98 784
16 Russie 581 783 66 Colombie 97 389
17 Suisse 357 969 67 Nouvelle-Zélande 96 678
18 Belgique 352 270 68 NTT 94 869
19 Suède 346 920 69 Carrefour 94 454
20 Exxon Mobil 339 938 70 Chili 94 100
21 Wal-Mart Stores 315 654 71 HSBC 93 494
22 Royal Dutch Shell 306 731 72 ENI 92 603
23 Taiwan 305 200 73 Aviva 92 579
24 Turquie 302 561 74 IBM 91 134
25 Autriche 294 663 75 McKesson 88 050
26 BP 267 600 76 Honda 87 510
27 Indonésie 257 806 77 State Grid 86 984
28 Arabie saoudite 250 892 78 Hewlett-Packard 86 696
29 Norvège 250 805 79 BNP-Paribas 85 867
30 Pologne 242 226 80 PDVSA 85 618
31 Danemark 241 690 81 Philippines 84 835
32 Afrique du Sud 213 100 82 Algérie 84 817
33 Grèce 205 493
83 UBS 84 707
34 General Motors 192 604 84 Bank of America 83 980
35 Chevron 189 481 85 Hitachi 83 596
36 Finlande 186 154 86 China Nat. Petroleum 83 556
37 Toyota Motor 185 805 87 Pemex 83 381
38 Irlande 184 700 88 Nissan 83 273
39 Ford Motors 177 210 89 Berkshire Hathaway 81 663
40 Portugal 167 944 90 Home Depot 81 511
41 Conoco Phillips 166 683 91 Valero Energy 81 362
— Hong Kong (Chine) 164 144 92 J .P. Morgan & Chase 79 902
42 Thaïlande 163 512 93 Samsung 78 716
43 Iran 161 483 94 Matsushita 78 557
44 General Electric 157 153 95 Égypte 77 032
45 Argentine 152 049 96 Deutsche Bank 76 227
46 Total 152 360 97 HBOS 75 798
47 ING group 138 235 98 Verizon 75 111
48 Citigroup 131 045 99 Cardinal Health 74 915
49 AXA 129 839 100 Prudential 74 744
50 Allianz 121 406
Source pour les PIB 2004 des Etats : Wikipedia (liste du FMI)
Source pour les chiffres d'affaires 2005 des entreprises : Fortune
Edifiant !
(NB : en 72eme position entre ENI et IBM vous avez oublié Aviva, 1er assureur anglais).
Rédigé par : Yogi | 28 octobre 2006 à 00:10
De plus il semble que les données FMI soient de 2004 et les données Fortune de 2006, mais la comparaison reste intéressante.
Rédigé par : Yogi | 28 octobre 2006 à 00:14
Exact Yogi, mon œil a fourché :). J'ai ajouté Aviva (du coup, Nestlé, qui était 100e est devenu 101e et disparait du classement). Merci de ta vigilance.
Les chiffres de Fortune, publiés en 2006, portent sur les chiffres d'affaires 2005 des entreprises. Pour les PIB, je n'ai pas trouvé mieux que 2004. Je pense que cette distorsion ne change rien au sens profond de l'affaire ;)
Rédigé par : José | 28 octobre 2006 à 00:17
Oui! des chiffres comme ça, ça vaut tout un manuel de politique contemporaine!
Rédigé par : Roland | 28 octobre 2006 à 00:33
Et les 1O premières : pétrole et automobile (sauf wall mart mais qui n'existerait pas sans le pétrole et l'automobile)
Rédigé par : isabelle | 28 octobre 2006 à 01:38
N'étant pas économiste, je ne suis pas sûr cependant de comprendre ce qui est comparé ici. Les chiffres d'affaire des sociétés étant réalisés dans des pays, ils participent au PIB (pour autant qu'il s'agisse de produits finaux) et donc ces chiffres se recouvrent partiellement, n'est-ce pas ?
Et peut-on dire que le PIB représente "La France" ou "Les Français" ?
Enfin si l'idée est de comparer les "flux monétaires manipulés par les acteurs publics ou privés", ne faudrait-il pas comparer CA des sociétés avec le montant des impôts perçus par les états ?
Rédigé par : Yogi | 28 octobre 2006 à 01:44
Mais il est très bien ce yogi, là !
J'ai plus rien à faire !
(allez, juste pour le déplacement, il faudrait en fait, pour que ce soit pertinent, comparer le budget des états (sans commune mesure avec le PIB des pays, genre dix à cent fois moins), avec la marge brute des entreprises.
Autant vous dire, que, en gros, les Etats disparaissent du classement.
A la décharge de José, (et comme il le note lui-même dans son post), les données en question sont difficiles à compiler.
Rédigé par : casabaldi | 28 octobre 2006 à 02:14
Le budget des états est une fraction importante de la pression ficsale (représentée par les prélèvements obligatoires) qui serait en France d'environ 45% du PIB, il me semble.
Pas certain que ce soit si faible par rapport au PIB que dix à cent fois moins ?
Rédigé par : jcm | 28 octobre 2006 à 07:14
@Yogi : oui, bien sûr, il y a recouvrement entre le chiffre d'affaires des entreprises et le PIB des Etats. Tout ça ne s'additionne évidemment pas. Il s'agissait ici de comparer des “poids“ : Exxon pèse autant que la Suède et 3 fois le Vénézuéla.
Le PIB représente “la France“ plutôt que “les français“, mais je me suis amusé il y a quelques semaines à “traduire“ le PIB en le divisant par le nombre de français : on obtenait environ 25.000 € par français et par an, soit l'équivalent d'un salaire net de 12.500 € par tête de pipe par an.
@ Casabaldi et jcm : pour info, le budget de l'Etat français se montait en 2005 à 367,53 milliards de dollars (288,4 milliards d'Euros, contre 283 en 2004, source Les Echos), soit environ 17,5% du PIB.
Ce budget n'inclut évidemment pas les budgets sociaux (Sécu, retraites).
En poussant la comparaison -mais en poussant beaucoup-, on pourrait dire que le budget de l'Etat français est, à 10% près, équivalent au chiffre d'affaires d'Exxon.
Un mot encore, pour ce que j'en comprends (les spécialistes sont les bienvenus pour corriger), le PIB d'un pays reste la donnée la plus cohérente avec le chiffre d'affaires d'une entreprise. La valeur ajoutée dégagée par un pays correspondrait à la marge brute d'une entreprise.
Rédigé par : José | 28 octobre 2006 à 09:44
Je persiste. Je pense qu'il faut comparer le CA (et plutot la marge brute) d'une entreprise avec le budget d'un Etat.
Le PIB n'a rien à voir avec l'Etat.
L'entreprise fonctionne avec l'argent qui y rentre (sa marge brute), l'Etat avec son budget. L'un est l'autre peuvent donc, avec celà, couvrir leux dépenses de fonctionnement, et dégager, soit une bénéfice (cas général pour les entreprises) soit un déficit (ces général pour les Etats).
Rédigé par : casabaldi | 29 octobre 2006 à 18:10
Même remarque que ci-dessus : la comparaison PIB/CA n'a pas grand sens. Plutôt que de développer, je renvoie à un ancien billet de Ceteris Paribus
Bien cordialement,
EL
Rédigé par : EL | 29 octobre 2006 à 19:35
@ Casabaldi et EL : je n'ai jamais prétendu ici mener une “étude scientifique“ : je n'en ai pas la compétence et je dis bien m'être “amusé“ dans le post.
Si je puis trouver des données plus “cohérentes“, je referai ce post avec plaisir. Si vous les avez ou si vous savez où les trouver, n'hésitez pas à me les communiquer ou à me l'indiquer.
Ce qui est significatif ici, y compris avec “ces“ chiffres, c'est que le poids de nombreuses entreprises est supérieur à celui de la très grande majorité des Etats.
Cela a au moins une conséquence tangible : la facilitation de la pression exercée par certaines entreprises -par voie de lobbying ou autre- sur nombre d'Etats.
Dernier exemple en date que je trouve à l'instant dans un mail de jcm : "Addis-Abeba tente de labelliser ses trois variétés les plus connues afin que ses producteurs soient mieux rémunérés. La chaîne américaine Starbucks s'y oppose."
Rédigé par : José | 30 octobre 2006 à 10:39
Par divers mécanismes la puissance économique démesurée des entreprises peut avoir des effets dévastateurs, et je viens de recevoir ceci :
"LISTE DE DIFFUSION DU M.D.R.G.F
Culture du blé : les systèmes intégrés utilisant moins de pesticides et d’engrais sont plus performants économiquement que les systèmes de culture conventionnels selon l’Institut National de Recherche Agronomique (INRA) !
Des expérimentations (1) conduites pendant 4 ans par l’INRA, en relation avec ARVALIS et les chambres d’agriculture dans des situations géographiques et agronomiques variées prouvent que le choix de variétés de blé tendre rustiques associées à des itinéraires culturaux intégrés économes en intrants (pesticides, engrais) est plus performant économiquement que les méthodes conventionnelles dites ‘raisonnées’ !
Ainsi, sur l’ensemble des 26 essais suivis en 2006, l’itinéraire intégré permet de dégager en moyenne 56 Euros de plus de marge par hectare que la conduite classique (raisonnée) plus gourmande en intrants. L’écart peut même aller, dans certains cas, jusqu’à plus de 160 Euros /hectare ! En comparant les différents essais, les chercheurs ont montré que les systèmes intégrés étaient plus rentables que les systèmes conventionnels dans 92% des cas en 2006.
Ces systèmes dits ‘intégrés’ utilisent 40% de semences en moins que la conduite classique, 0 régulateur de croissance (contre 1 en conventionnel) et 1 seul fongicide (contre 2 en conventionnel). Ils utilisent également 30 unités d’azote de moins par hectare. Ils sont donc favorables à la protection de l’environnement.
Pour rappel, l’INRA avait déjà conseillé l’adoption de systèmes intégrés en agriculture ( et également de l’agriculture biologique) dans son expertise collective sur la réduction de l’utilisation des pesticides réalisée conjointement avec le Cemagref en 2005 (2).
Dans ces conditions, le soutien du gouvernement à l’agriculture raisonnée (3) est proprement incompréhensible, l’avantage écologique et économique allant clairement aux systèmes intégrés. La motivation de ce soutien ne peut être que dictée par les intérêts des firmes multinationales productrices de pesticides. Rappelons que c’est l’UIPP (4), le lobby de ces firmes au niveau français, qui a créé le réseau FARRE, à l’origine de l’agriculture raisonnée !
Le MDRGF demande au gouvernement de revoir sa copie et de donner préférentiellement son soutien aux systèmes de production intégrés et biologiques, seuls susceptibles de protéger l’environnement et la santé publique, tout en étant plus performants économiquement.
(1) : voir : la France Agricole n°3155 du 20 10 06 et les publications de B. Rolland de l’INRA de Rennes comme : http://www.inra.fr/dpenv/pdf/rollac49.pdf
(2) : http://www.mdrgf.org/news/news060106_INRA.html
(3) : rappelons qu’un objectif de 30% des exploitations en agriculture raisonnée pour 2008 a été posé alors qu’aucun objectif pour la production intégrée ou l’agriculture bio n’a été avancé par le gouvernement ! voir le plan sur mdrgf.org
(4) : Union des Industries pour la Protection des plantes - voir : http://www.uipp.org/uipp/partenaire.php "
N'est-ce pas la démonstration que ces entreprises ont utilisé leur "puissance" pour orienter les actions de l'état en faveur de leur propre intérêt au détriment de l'intérêt général ?
Et je ne rapellerai pas ici l'intense (et durable) pollution de nos eaux souterraines et de surface ni quelques 100 000 ou 150 000 nouveaux cancers annuels imputables à diverses pollutions, aux pesticides résiduels dans les fruits et légumes, aux teneurs très faibles en certaines molécules protectrices de nos organismes des fruits et légumes du fait de méthodes de culture qui en réduisent le développement...
Rédigé par : jcm | 30 octobre 2006 à 13:17