Avant-hier, Dimitri m'a appelé pour me souhaiter un bon anniversaire. Notre anniversaire. En effet, il y a 18 ans, le 1er avril 1988, nous avons créé tous deux une agence de communication qui a connu une certaine réussite et que nous avons revendue partiellement en 2000 et intégralement en 2002.
FKGB a salarié en CDI jusqu'à près de 130 personnes, dont le salaire moyen était voisin de 2400 € brut en 2000, et fait travailler jusqu'à 300 contractuels (photographes, intermittants du spectacle) ou sous-traitants. De mémoire, et à l'inverse de la pratique du secteur, j'ai dû autoriser, sur la fin -par lassitude-, l'engagement de 2 ou 3 CDD et j'ai résisté, pendant 12 ans, au recrutement d'assistant(e)s et à “l'utilisation“ de stagiaires.
Pourquoi ? Parce que je croyais et je crois toujours qu'une entreprise ne se développe qu'en recrutant les meilleurs. Et que les meilleurs ont simplement besoin et droit d’entretenir avec l’entreprise une relation équilibrée.
Recruter des gens au rabais, avec des contrats à sens unique, est non seulement malsain, mais contre-productif : on n'est ni légitime, ni cohérent, à demander de l'intelligence et de la performance dans son travail à quelqu'un qu'on traite contractuellement comme un con.
Pour tout dire, j'avais, des rapports sociaux, une vision qu'on jugera peut-être simplette. Recruter quelqu'un, c'était l'engager mais également s'engager.
Sans limites autres que celles-ci : le souhait de l'un des deux de passer à autre chose -désir légitime de changer de vie, de métier, de poste, de boîte-, l'inadéquation du travail du salarié aux besoins de l'entreprise ou à la demande des clients et, en cas de crise, l'incapacité de la boîte à tenir ses engagements.
Les entreprises ont besoin de plus de souplesse et de flexibilité pour traiter ces deux derniers cas. Personne ne le conteste. Cela suppose des contreparties, dans le cadre contractuel intuitu personæ et dans le cadre mutualisé de la protection sociale. Il existe un terme pour cela : la flex-sécurité, mise en pratique dans plusieurs pays. C'est à un système de ce type qu'on doit aboutir pour l’ensemble des salariés.
Pour cela, doit être mis en place un contrat de travail unique (ou quasiment, alors qu'il en existe aujourd'hui 37 différents en France), prévoyant une période d’essai raisonnable (trois mois, renouvelables une fois) et des droits progressifs, à compter du premier mois.
Le CPE va à l'inverse de cette philosophie : voila pourquoi son existence même n'est pas négociable.
Premier texte que je lis ce matin, à la radio en grève les variations Goldberg.
Lire cela avec ce Bach dans les oreilles redonne une fois de plus l'envie de "changer le monde" : oui, il serait possible et peut-être pas si difficile qu'on le croit de voir, de faire différemment, et beaucoup mieux pour chacun et pour tous.
Enore faudrait-il que les électeurs tout autant que "la rue" sachent refuser à d'orgeuilleux crétins le droit d'utiliser quelques déficiences de notre société avec l'immodestie et l'autoritarisme de celui qui veut d'abord et avant tout se tailler une plus grande stature "d'homme détat", se parer de flamboyance.
C'est peut-être simplement l'orgueil qui est de trop ici, avec l'envie de séduire à tout prix qu'il peut entrainer.
La préoccupation n'est donc plus de "faire correctement son boulot" et l'arbre de l'ambition cache la forêt...
Faire correctement son boulot : le principal souci de Bach, soutier de la musique, travailleur forcené, bon père de famille qui n'a jamais cherché à briller.
Mais à elle seule la musique qu'il nous laissa restera longtemps comme un astre qui illuminera le petit matin, la nuit et jusqu'au jour le plus ensoleillé de quelques (nombreux) vivants : plus forte que n'importe quel soleil.
Oui, la question, la seule, est peut-être bien là : "Faire correctement son boulot", et l'histoire retiendrait plus longtemps que celui de quiconque le nom de ceux auxquels on reconnaitrait ce mérite au niveau le plus élevé ?
Ce qui exigerait une très grande modestie de la part de ceux qui se rêveraient vraiment "éternels" ?
Mais Bach ne semble pas avoir eu une seconde une telle ambition : il voulait juste satisfaire aux exigences de sa charge et être un "honnête homme".
L'éternité lui est "tombée dessus" sans qu'il en demande tant.
Tout est peut-être beaucoup plus simple qu'on se l'imagine...
Rédigé par : jcm | 04 avril 2006 à 07:49
.....et pour que le travail soit mieux compris, pour que les attentes soient mieux satisfaites, il faudrait sans doute que le travail, l'entreprise avec sa précarité, ses dynamiques soit mieux connue de nos dirigeants. En avons nous qui soient issus de la société civile? J'allais l'oublier, nous avons Th Breton.... Je pensais plutôt à de vrais chefs d'entreprise, propriétaires risquant leurs propres billes....
Un utopiste.
Rédigé par : noel gerard | 04 avril 2006 à 22:02
Bon anniversaire à FKGB, José !
J'y était et je me trouve bien nostalgique en ce moment... M'en fout, c'était génial... Et je n'ai aucun regret... et en plus j'étais en CDI !
Porte toi bien !
Rédigé par : Piva | 05 avril 2006 à 02:55