Une fois au moins au cours de votre vie, il a dû vous arriver personnellement d’avoir dépensé plus d’argent que vous n’en disposiez. Vous savez donc d’expérience qu’une telle situation ne peut durer éternellement.
Un jour ou l’autre, en fonction de la confiance que vous accordent vos fournisseurs ou vos banquiers, les uns comme les autres vous demandent de réduire votre train de vie, de combler vos découverts et de solder les comptes. Si vous en êtes incapable, des huissiers débarquent chez vous et saisissent vos biens. Si cela ne suffit pas encore, vous êtes déclaré en cessation de paiement, puis en faillite. C’est vers cette situation que se dirigent, à grands pas, les Etats-Unis. Et nous avec...
Le bon indicateur de cette situation est la balance commerciale : elle représente le solde entre l’importation et l’exportation de produits et de services de l’ensemble formé par les institutions, les entreprises et les ménages : quand un pays exporte plus de biens qu’il n’en importe ou, autrement dit, dépense moins qu’il ne gagne, son solde est positif ; dans le cas contraire, il est négatif.
La balance commerciale US, négative depuis plusieurs dizaines d’années et, depuis 10 ans, dans des proportions croissantes et alarmantes (voir schéma ci-dessous), a atteint un déficit de 68,5 milliards de dollars en janvier dernier, pour un montant cumulé de près de 9.000 Md$.
Les causes ? Un train de vie trop important de tous les acteurs de la vie américaine, depuis les ménages jusqu’à l’Etat Fédéral (dépenses civiles et, surtout, militaires, induites par la “guerre contre le terrorisme“, etc).
Jusqu’ici, le monde entier finançait intégralement les déficits américains : première puissance économique, financière, militaire et technologique, moteur de la croissance mondiale, stable politiquement, les Etats-Unis étaient l’archétype de l’emprunteur sans risque, auquel on peut faire confiance et chez lequel on a intérêt à placer ses économies.
C’est ainsi que les Etats, les entreprises, les investisseurs institutionnels ou privés du monde entier, y ont engagé une partie importante de leurs avoirs en achetant des bons du trésor, des entreprises, des actions, de l’immobilier américains.
Mais aujourd’hui, la dégringolade de leurs déficits, dont aucune mesure structurelle n’indique que les Etats-Unis songent à la stopper, inquiète l’ensemble de la communauté internationale et commence à susciter une crise de confiance. Investir aux Etats-Unis est-il encore le meilleur et le plus sûr des investissements ?
Les créanciers de l’Amérique se posent tellement la question qu’en décembre 2005, les entrées de capitaux des Etats-Unis ont été inférieures de 9,08 Md$ aux sorties ; en janvier 2006 (derniers chiffres connus), inférieures de 2,5 Md$ : pour la première fois dans l’histoire, le monde ne finance plus l’intégralité de la dette américaine.
Pourquoi ce recul ? Pour des raisons multiples, qui tiennent aux intérêts de chacun (Etats, institutionnels, entreprises, etc).
Exemples : les chinois, prudents, préfèrent investir dans l’acquisition de concessions pétrolières, nécessaires à leur développement ; les caisses de retraite japonaises seront bientôt conduites à rapatrier une partie de leurs avoirs pour financer les retraites d’une population nipponne vieillissante ; les vénézuéliens, opposés à la politique américaine, ont d’ores et déjà annoncé, le 30 septembre dernier, le rapatriement de leurs placements en Amérique ; les investisseurs institutionnels ou privés et les entreprises du monde entier diversifient placements, prises de participation et investissements et se tournent massivement vers l’Asie…
Que peut-il se passer désormais ? S’il est exclu, à court terme, que les Etats-Unis réduisent leur train de vie et leur dette, au fur et à mesure que leur solvabilité diminuera, le dollar perdra en valeur. La réponse est connue et déjà mise en œuvre : rendre les placements en dollars plus attrayants et, pour cela, poursuivre la hausse des taux d’intérêts.
La prochaine réunion de la Réserve Fédérale, désormais dirigée par Ben Bernanke, en remplacement d’Alan Greenspan, a lieu ce mardi et devrait décider d’un 15e relèvement consécutif de ses taux directeurs, pour les porter à 4,75% (par comparaison les taux de la BCE, dirigée par Jean-Claude Trichet, plafonnent à 2,5%).
Cela suffira-t-il ? Non.
La conséquence mécanique d’une hausse des taux à répétition sera une baisse de l’investissement, puis un ralentissement de l’économie américaine. Si le moteur de l’économie mondiale tousse, le reste du monde s’enrhumera.
A partir de là, tout est possible et, notamment, une chute brutale du dollar, avec pour conséquence l’effondrement de l’économie américaine, puis, par effet domino, une crise mondiale d’une ampleur comparable à celle de 1929.
Résumons-nous : les Etats-Unis dépensent de l’argent qu’ils n’ont pas. Le reste du monde finance ou plutôt finançait ces dépenses. Aujourd’hui, on voit les premiers signes de rupture de ces financements. Conséquence à terme : une faillite américaine, qui provoquera une crise économique mondiale de grande ampleur.
Tout est en place pour que ce scénario se déroule rapidement.
En lire plus d'ici à ici.
Les commentaires récents